Lexie Une histoire de genres

Publié le par Henri LOURDOU

Lexie Une histoire de genres

Lexie

Une histoire de genres

Guide pour comprendre et défendre les transidentités

Marabout, juin 2021, 286 p.

 

Face à une méconnaissance massive de ce phénomène minoritaire que représentent les transidentités, et plus largement les orientations sexuelles minoritaires que sont les homosexualités et bisexualités, rassemblés dans le sigle LGBT auquel se sont rajoutés au fil des ans les lettres QIA (Queer, Intersexes et Asexuelles), cet ouvrage à visée avant tout pédagogique est une réussite.

 

Il permet en particulier de rompre avec des représentations caricaturales et inquiètes, qui nourrissent des mots et comportements violents et discriminatoires.

 

Faire un effort de compréhension suppose cependant un pré-requis : avoir une capacité d'empathie vis-à-vis des personnes concernées.

Cela est bien sur favorisé par le fait d'avoir ce genre de personne dans son entourage. Ce qui n'est le cas que d'une minorité (dont je fais partie).

Pour les autres, l'effort est donc plus grand. Il est cependant nécessaire et accessible à tous-tes. Y compris aux personnes pour lesquelles la maîtrise de l'écrit est un problème, et qui voient donc par exemple l'écriture inclusive comme une difficulté inutile.

A celles-là, la démagogie d'extrême-droite offre une perspective plus facile : déshumaniser et stigmatiser les personnes "différentes" au nom d'une norme majoritaire implicite et ininterrogée.

Mais, au-delà de l'extrême-droite, dont la violence ouverte peut rebuter, il existe aussi une forme plus douce de déni qui s'appuie sur la sourde inquiétude ou la paresse de gens "normaux" bousculés dans leurs repères, ...et leur position dominante.

Et ici interviennent tous les soi-disant "universalistes" fustigeant tout affichage de différence revendiquée collectivement comme du "communautarisme". L'inflation de l'usage de ces deux mots est inversement proportionnelle à l'effort de compréhension de la situation réelle de toutes les minorités discriminées. Et elle cache la position dominante de ceux qui le plus souvent les utilisent.

 

 

Un effort de compréhension qui passe par le vocabulaire

 

Les transidentités ont toujours existé. Ce qui est nouveau est leur visibilité. Et cette visibilité oblige à interroger la norme implicite qui les invisibilisait.

Cette norme postulait la confusion entre le sexe biologiquement défini (mâle/femelle) et le genre socialement construit (masculin/féminin).

Or cette confusion n'est pas fondée. C'est ce que démontre l'existence des personnes en contradiction avec le genre (masculin/féminin) qui leur est assigné à la naissance sur la base de leur sexe.

La question est encore compliquée par le fait que les caractéristiques sexuelles ne sont pas strictement binaires et se distribuent sur un spectre très large qui, en de rares cas, mélange à quasi-parité caractères "mâles" et caractères "femelles" : c'est le cas des personnes qualifiées d'Intersexes (le I de LGBTQI).

Que toutes ces personnes soient très minoritaires (environ 1% de la population selon diverses enquêtes sur les transgenres) ne change rien à leur droit à la reconnaissance.

Mais la chose va plus loin, car, contrairement à ce que pensent certaines féministes, pour qui les femmes transgenres restent des hommes et sont des espions mâles au sein du féminisme, la question des transidentités pose la question de la norme patriarcale et hétérosexuelle en vigueur. D'où l'apparition des personnes se présentant comme Queer ou Asexuelles : c'est-à-dire refusant la binarité de genre).

Un premier mot indispensable : cisgenre. Ce mot est nécessaire pour comprendre les transidentités. Il désigne la grande majorité de personnes pour lesquelles leur genre ressenti correspond à leur assignation de naissance. Les gens dits "normaux". Or c'est la notion de "normalité" qui doit être interrogée et remise en question. Car en son nom, les personnes transgenres ont été le plus souvent niées dans leur identité et discriminées : une violence souvent invisible, mais pourtant bien réelle et traumatisante.

 

Un second mot indispensable : cisnormativité. Ce mot est à son tour nécessaire pour penser la fluidité des identités de genre et admettre que le modèle strictement binaire et hétérosexuel imposé en Occident de façon croissante au cours des siècles est un modèle non universel et mutilant qui ne permet pas aux individu·es de s'épanouir dans leur identité ressentie.

Loin d'invalider le combat féministe, en réalité le mouvement LGBTQIA le prolonge et l'approfondit car il remet en cause le patriarcat de façon radicale.

 

 

Ce livre, très complet, et comportant un index précieux des termes et sigles utilisés en annexe, est une entreprise très bienvenue.

Bien qu'un peu ardue, en raison de la densité du propos, sa lecture est très accessible et ne jargonne pas sans nécessité.

Elle permet de répondre à de nombreuses interrogations sur cette réalité méconnue, et pour cela trop souvent fantasmée, caricaturée et déformée.

Un autre compte-rendu du livre :

http://monbiblioblog.revolublog.com/lexie-une-histoire-de-genres-marabout-a214792571

 

 

 

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