Covid 19, "rassurisme" et anti-libéralisme

Publié le par Henri LOURDOU

Covid 19, "rassurisme" et anti-libéralisme.

 

Dans l'arc confusionniste en voie de solidification entre une partie de l'extrême-droite, de l'écologie radicale et de l'extrême-gauche autour de la gestion gouvernementale de l'épidémie, deux registres issus l'un de l'écologie radicale, l'autre de l'extrême-gauche anti-libérale me semblent intéressants à noter.

 

L'un, lié à la problématique anti-vax, tend à minimiser la portée de l'épidémie et ses conséquences potentielles : il constitue un courant que l'on peut qualifier de "rassuriste".

 

L'autre, entièrement axé sur l'opposition totale aux gouvernements en place et à tout ce qu'ils peuvent faire, se porte sur la critique de l'idéologie du "care" et ce qu'un article récent du Monde Diplo (décembre 20) appelle "la tyrannie de la bienveillance". Cela permet au passage de mettre dans le même sac les gouvernements "libéraux" et la social-démocratie honnie.

 

Ces deux registres complètent, et parfois se confondent avec, le complotisme d'extrême-droite. En sorte qu'on peut rencontrer des personnes qui alignent les trois registres en revendiquant fièrement leur non-port du masque et leur refus d'obéir aux consignes sanitaires : ceci constituant la manifestation de leur hyper-lucidité et de leur supériorité sur les "moutons" que nous sommes.

 

Voyons un peu quelques uns de leurs arguments

 

Un argument "rassuriste" : les chiffres comparatifs biaisés.

 

J'ai vu sur une affichette posée sur l'éventaire de ma boulangère bio (qui ne portait pas le masque) un argument fondé sur le taux de mortalité des malades du Covid rapporté à la population totale et comparé à d'autres maladies. C'est une version un peu plus affinée de ce diagramme issu du film "Hold up" :

On y voit un "comparatif des morts dans le monde chaque année" sous forme de barres verticales très parlantes entre les "maladies cardiovasculaires" (17,7 Millions), les "cancers" (9,6 Millions), la Faim (9,13 Millions), la "Pollution de l'air" (8 Millions)...et le "Coronavirus" (1,1 Million) avec un personnage qui se penche sur ce dernier en s'exclamant : "Oh Mon dieu ! Alerte générale ! Arrêtez le monde entier, nous allons mourir !!"

En amalgamant des formes de mortalité qui n'ont rien à voir avec une épidémie devenue une pandémie, la comparaison est évidemment non pertinente.

De plus, elle fait totalement l'impasse sur les mesures de confinement qui ont permis en effet de limiter le nombre de morts à 1,1 Million ! Qu'en aurait-il été si ces mesures n'avaient pas été prises ? Ces "je sais-tout" ont-ils la réponse à cette question ? Non, bien évidemment !

De la même façon, les % de mortalité comparent des choses qui ne sont pas comparables pour arriver à un résultat fixé d'avance : minimiser l'épidémie et son impact.

Et de là, induire, ou plutôt confirmer, qu'elle est une invention de Big Pharma pour vendre ses vaccins...Avec la complicité de tous les gouvernements à sa solde.

 

Un argument "anti-libéral" : la critique de "l'idéologie du care".

 

Ainsi , la "bienveillance" serait un mot à bannir de notre vocabulaire, pour la seule raison qu'il est abusivement utilisé par les "dominants" pour dissimuler leurs intentions malignes. Donc "prendre soin des autres" devient suspect, et l'idée de "revaloriser les métiers du soin" introduite par quelques social-démocrates comme Martine Aubry ou Najat Vallaud-Belkacem ne serait qu'un "cache-misère" visant à faire oublier le démantèlement des services publics de santé et d'éducation par les gouvernements libéraux ou "socio-libéraux".

Plus : imposer dans le discours public cette "bienveillance" constituerait donc une nouvelle forme de "tyrannie" douce.

On ne peut encore une fois que déplorer ce goût pseudo-critique du paradoxe, qui amena dans un temps pas si lointain à critiquer les "libertés formelles", voire les élections libres et pluralistes au nom d'une "vraie démocratie" dont on a pu expérimenter les résultats !

Car ce qui est induit par ce discours est bien évidemment le soupçon sur l'ensemble des mesures sanitaires concernant l'épidémie, au nom toujours de la vigilance permanente contre l'Ennemi libéral qui ne permet aucun compromis, même en cas de danger subi en commun.

 

Ces arguments font bien sûr le lit du complotisme le moins raffiné, et nourrissent donc le confusionnisme ambiant.

 

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