Compromis pourri

Publié le par Henri LOURDOU

Compromis pourri
Compromis pourri

 

Ainsi le RN, au bout de quarante ans d'évitement du combat sur le fond par la gauche politique et le mouvement syndical, a obtenu une "victoire idéologique" : la reconnaissance par la majorité de l'Assemblée nationale (avec les voix d'anciens adhérents macronisés du Parti Socialiste) du principe de la "préférence nationale".

Cela au nom du compromis nécessaire pour faire passer une loi initiée par le gouvernement sur "l'immigration et l'intégration", alias "loi Darmanin". Ce 19 décembre 2023 sera-t-il à marquer d'une pierre aussi noire que le 10 juillet 1940, lorsqu'une Chambre des députés élue avec une majorité de Front Populaire a voté les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain ?

Seul l'avenir le dira.

Il n'en reste pas moins que le "compromis" avec la Droite LR extrême-droitisée voté ce jour relève de ce que le philosophe Avishai MARGALIT a baptisé "les compromis pourris".

 

Car il y a compromis et compromis.

Celui-ci fait partie des compromis qui, au lieu d'éviter le pire, ne font que lui ouvrir la voie.

L'exemple le plus emblématique étant le fameux accord de Munich en 1938 ayant accordé à Hitler le démantèlement de l'Etat tchécoslovaque à son profit.

Cela au nom de la préservation illusoire de la paix.

Il y avait alors en France un fort courant pacifiste, notamment à Gauche, qui s'en est réjoui.

Tout paraissait mieux que la guerre.

Churchill avait résumé la situation par ces phrases concernant les dirigeants anglais et français qui avaient signé ce compromis : "Ils avaient le choix entre le déshonneur et la guerre. Ils ont choisi le déshonneur . Et ils auront la guerre."

Toute proportion gardée, les élus macronistes avaient le choix entre les principes républicains et le maintien artificiel d'une majorité parlementaire autour du gouvernement. Ils ont choisi ce maintien en sacrifiant ces principes. Et ils perdront la majorité.

 

Principes sacrifiés

 

Le principe de l'égalité devant la loi existe en France depuis la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 août 1789. C'est un principe à valeur constitutionnelle, dont le respect est assuré par le Conseil Constitutionnel.

Il est allègrement violé par cette loi concernant l'accès aux prestations sociales des étrangers résidents légaux non-européens. Les conditions posées pour qu'ils y accèdent sont différentes de celles des Français ou des citoyens de l'UE. Il faudrait qu'ils justifient de cinq années de travail à temps plein pour accéder aux Allocations familiales ou à l'Aide Personnalisée au Logement.

Cet aspect n'est bien sûr pas le seul point négatif de cette loi concernant l'égalité des droits.

Animée, comme les précédentes lois sur l'immigration, d'un esprit de suspicion systématique à l'égard des exilé-es, elle réduit, sous couvert de simplification administrative, les possibilités d'accès à des titres de séjour.

 

Mener la bataille idéologique pour l'égalité des droits est donc une urgence absolue pour la gauche politique et le mouvement syndical.

La pente à remonter sera rude, mais la construction d'une majorité alternative à l'extrême-droite est à ce prix.

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