Giuliano DA EMPOLI Le mage du Kremlin

Publié le par Henri LOURDOU

Giuliano DA EMPOLI Le mage du Kremlin

Giuliano DA EMPOLI

Le mage du Kremlin

roman, mars 2022, Gallimard, 282 p.

 

Ce roman a bénéficié du contexte de sa parution : l'aventure poutinienne en Ukraine a soulevé de nombreuses interrogations sur la "logique" de cette guerre d'agression.

L'auteur, jeune spin doctor franco-italien qui fut le conseiller de Mateo Renzi, est un garçon brillant et cultivé qui nous offre avec ce roman à clé (le personnage central et narrateur, baptisé Vadim Baranov, est largement inspiré du théoricien de la "verticale du pouvoir" et de la "démocratie souveraine" Vladislav Sourkov https://fr.wikipedia.org/wiki/Vladislav_Sourkov ) une interprétation des motivations de Vladimir Poutine.

Ceci à travers un résumé de l'Histoire post-soviétique de la Russie depuis 1990, largement méconnue en Occident.

Cette Histoire est bien sur lue et interprétée avec les lunettes du narrateur, présenté comme le plus proche conseiller de Poutine.

Il ne faut donc pas prendre toutes ses affirmations péremptoires au pied de la lettre.

 

Cependant, on ne peut se déprendre d'une sorte de fascination face à ce déploiement d'intelligence machiavélique.

Et certaines considérations donnent à réfléchir.

Notamment celles concernant le caractère prémonitoire du roman d'Evguéni Zamiatine "Nous autres" sur l'évolution de nos sociétés numériques et la fin de la politique.

Le plus contestable bien évidemment est le pseudo-constat sur l'éternité du "caractère national russe", inapte par nature à la démocratie libérale, qui fonde la double théorie de la "verticale du pouvoir" et de la "démocratie souveraine" justifiant le pouvoir dictatorial de Poutine.

Au passage, l'auteur nous livre d'ailleurs une des clés de la constitution de ce pouvoir : la continuité du personnel étatique avec celui de l'ère soviétique, tout spécialement dans les organes de répression.

Par contre, interprétation plus crédible de l'arrogance américaine et de ses effets négatifs : mais là rien de nouvellement sensationnel ! Pareillement pour le rôle des oligarques russes, avec deux portraits convaincants de Mikhaïl Khodorkovski et Boris Berezovsky.

Une lecture donc prenante, mais à relativiser !

 

En particulier, on ne saurait en déduire que les Russes n'ont que le gouvernement qu'ils méritent... Il est certain qu'ils méritent mieux. Et nous devons continuer à soutenir sans faiblir ceux d'entre eux qui ont le courage de le revendiquer.

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