Titiou LECOQ Les grandes oubliées
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Livre alerte et réjouissant, il n'en est pas moins hautement instructif. Il montre bien en effet, contre la Vulgate progressiste qui a encore cours, que l'Histoire est faite d'avancées et de reculs. Aucun acquis n'est définitif dans la lutte perpétuelle pour l'émancipation et le droit au bonheur.
En ce qui concerne les femmes, la fausseté de la conception marxiste de l'Histoire est éclatante. Cela devrait ramener quelques-uns à plus de modestie.
Michelle PERROT, qui a quelque temps cheminé comme moi avec cette conception progressiste et économiste de l'Histoire, résumée par la métaphore du train du Progrès, le confirme bien dans sa préface. Aucun "mode de production" économique ne garantit l'émancipation des dominés. C'est bien à leurs luttes collectives qu'ils doivent les progrès de leur liberté.
Pour autant, le retour sur le passé tel qu'on peut le connaître montre des tendances. En ce qui concerne la France, qui est l'objet d'étude de Titiou Lecoq (comme de Michelle Perrot, historienne de métier), la réaction antiféministe a culminé au XIXe siècle, après avoir pris son essor à la Renaissance, elle succède à une autre période de grande régression que fut l'avènement de la sédentarisation, de l'agriculture et de l'urbanisation au Néolithique. Cela remet en cause bien des préjugés masculins, qui ont longtemps passé pour des vérités établies. Ils reposaient en effet sur une écriture de l'Histoire du seul point de vue des Hommes. Il y a à cela des causes sociales bien sûr, dont la principale est l'essor de la classe savante des clercs, ces intellectuels d'Eglise qui ne voulaient pas de la concurrence féminine sur leur terrain, et ont donc largement utilisé la théologie pour inférioriser les Femmes...avec un succès qui s'est laïcisé et diffusé au XIXe siècle. Ce pouvoir collectif des Hommes a développé la misogynie et le sentiment d'infériorité chez les Femmes, mais s'est heurté à une résistance constante largement passée sous silence.
C'est cette résistance qui resurgit aujourd'hui grâce au dépouillement d'archives oubliées ou négligées. Et avec elle quelques noms, qui comme ceux de non-Blancs pareillement mis sous le boisseau, méritent une gloire jusque-là refusée.
Cette remise en cause de l'Histoire établie est un chantier passionnant et porteur d'espoir pour un monde pacifié et égalitaire.