Jonathan COE Le coeur de l'Angeleterre

Publié le par Henri LOURDOU

Jonathan COE Le coeur de l'Angeleterre

Jonathan COE

Le coeur de l'Angleterre

roman traduit de l'anglais par Josée KAMOUN

2018; 2019 pour la traduction, Gallimard, 552 p.

 

Ce pavé, qui se lit d'un trait, constitue ma première rencontre avec cet auteur. On y retrouve des personnages récurrents, introduits dans deux romans précédents : Bienvenue au club et Le cercle fermé.

Il s'agit d'amis de jeunesse qui ont partagé leur scolarité à Birmingham, ville de naissance de l'auteur en 1961, dans les années 70...comme lui.

Le personnage principal, Benjamin Trotter, a cinquante ans en 2011 où débute la narration. Ecrivain frustré, il poursuit l'écriture au long cours d'un manuscrit qui s'allonge d'année en année. Il doit s'occuper de son vieux père, ancien ouvrier à British Leyland, qui vient de perdre son épouse. Sa nièce Sophie, enseignante en Histoire de l'art, recherche l'âme soeur en dehors des intellectuels tourmentés qui ont peuplé jusque là sa vie sentimentale et sexuelle . Son vieil ami Douglas, journaliste politique de gauche en vue, mariée à une femme de la haute bourgeoisie londonienne, et père d'une fille révoltée qui pratique la surenchère gauchiste, suit la campagne laborieuse de Gordon Brown, l'héritier néo-travailliste de Tony Blair, qui vient d'essuyer les conséquences sociales de la crise financière de 2008.

De nombreux autres personnages viennent peupler cette chronique du "coeur de l'Angleterre", la "Middle England" (titre original du livre), entre 2011 et 2016.

C'est enlevé, plein d'un humour discret et so British qui se refuse à l'esprit de sérieux, et pourtant grave et profond : il ne s'agit ni plus ni moins que de nous expliquer pourquoi et comment la majorité des Anglais ont finalement voté en 2016, bien qu'à une courte majorité, en faveur du Brexit. Désindustrialisation et atteinte à la fierté ouvrière, immigration et xénophobie sur fond de nostalgie impériale, essor des droits des minorités et ressentiment contre le "politiquement correct", déconnexion de l'élite londonienne politico-médiatique, tous les éléments du cocktail toxique sont ici touillés dans des situations concrètes où ils s'expriment avec leurs raisons et leur déraison.

On adhère au destin des personnages et à leurs aventures du quotidien. Et on attend la suite : le réveil après la gueule de bois du Brexit. Car les promesses de lendemains qui chantent souverainistes n'ont pas été tenues...Un cas exemplaire à suivre.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article