Pourquoi défendre l'Etat de droit ?
Je viens de rédiger un texte constatant la polarisation et la radicalisation des opinions publiques et du champ politique qui les exprime.
Ce constat m’amène à justifier une radicalisation de mes propres positions sur le terrain écologique en particulier, en raison de l’urgence et de l’approfondissement des enjeux climatiques et de biodiversité.
C’est pour cette raison que, lesté du poids des expériences historiques de révolutions écrasées ou trahies, je trouve d’autant plus important de défendre le cadre de l’État de droit, seul cadre permettant de régler les différends de façon pacifique dans un esprit démocratique.
Si les changements radicaux que j’appelle de mes vœux ont peu de chance de rallier des majorités démocratiques à court terme, par contre, il importe que les acquis juridiques permettant de freiner les réactions anti-écolos et les projets climaticides soient préservés, de même que tous les instruments de garantie des libertés individuelles et de protection contre les discriminations, notamment à l’encontre des minorités .
L’État de droit n’est pas un obstacle à la démocratie, mais sa condition
Dans l’intéressante table-ronde organisée par « Le Monde » (n° daté 8-3-25, pp 8-9) à propos des menaces sur l’État de droit en France, ce point est souligné ainsi. Seul le socle de règles intangibles qui constituent l’État de droit (séparation des pouvoirs, égalité devant la loi, respect des normes juridiques et de leur hiérarchie, respect des décisions de justice) peut garantir le non-recours à la violence pour régler les litiges. Et donc permettre l’usage du droit de vote dans un contexte sain, sinon apaisé.
La mise en cause des juges et des cours de justice par des responsables politiques ou des médias dans le contexte récent est donc particulièrement malvenue. Elle concourt à créer un climat de remise en cause de cet acquis démocratique lentement constitué, notamment depuis la Révolution française et après 1945.
Les attaques contre l’État de droit ne viennent pas de n’importe où
« Il existe aujourd’hui une attraction pour les régimes autoritaires, enracinée dans une tentation fasciste ancienne dans nos sociétés. (…) Les régimes autocratiques veulent affaiblir l’Europe démocratique, dont l’État de droit est l’un des piliers essentiels. » (André Potocki, juge français élu au sein de la Cour européenne des droits de l’homme de 2011 à 2020).
Excellent résumé de la situation, qui se traduit concrètement par les attaques de deux ministres français (B Retailleau et G Darmanin) d’une présidente de Conseil Régional ( C Delga) et de la presse Bolloré et Baylet contre des décisions de justice qui ne leur conviennent pas. Ces derniers sont-ils tous conscients de servir d’idiots utiles à l’extrême-droite et aux régimes autocratiques ? On aimerait que certains d’entre eux réfléchissent davantage à la portée de leurs prises de position .