Plan eau de Macron : surtout du vent !

Publié le par Henri LOURDOU

Plan eau de Macron : surtout du vent !

Plan "eau" de Macron :

surtout du vent !

 

A peine les fumées de lacrymogènes de Sainte-Soline dissipées, et alors que deux manifestants sont encore entre la vie et la mort suite à l'opération de guerre médiatisée menée par le Ministre de l'Intérieur, le président a voulu "reprendre la main" en présentant son plan "eau".

En fixant un "cap de 10% d'économies d'eau" pour tous les secteurs à l'horizon 2030, il ne fait que reprendre (à la baisse) des chiffres déjà non tenus, comme le rappelle Sylvain Doublet dans l'interview ci-joint : en 2019 les Assises de l'eau organisées par le Ministère de l'écologie avaient fixé la baisse des prélèvements d'eau à 10% pour 2024 et à 25% pour 2034.

Or de tels chiffres sont non seulement nécessaires pour adapter notre demande à l'offre, mais aussi parfaitement réalisables, notamment par l'agriculture. Mais à certaines conditions rappelées par Sylvain Doublet.

 

Principal levier d'économie d'eau : la demande alimentaire.

 

"La vraie sobriété, ce serait de modifier les régimes alimentaires pour les orienter vers des produits moins consommateurs d'eau, c'est-à-dire des protéines végétales plutôt que des protéines animales. Une telle évolution permettrait aussi de répondre aux objectifs climatiques et de lutte contre l'érosion de la biodiversité. Il y a une grande marge de manoeuvre, puisque nous consommons trop de protéines par rapport à nos besoins physiologiques. C'est de très loin le principal levier d'économie mais il n'en a pas été question dans le cadre des annonces (du Président)." ("Le Monde", 01-04-23, p 8)

En ce qui concerne le bassin Adour-Garonne (Occitanie de l'Ouest et Sud de la Nouvelle Aquitaine), "l'irrigation agricole consomme annuellement entre 800 millions de et un milliard de mètres cubes. Le maïs, qui sert très majoritairement à nourrir des porcs et des volailles, représente à lui seul 75% des surfaces irriguées et 80% des volumes d'eau. S'il n'y a pas de modification de la demande alimentaire, nous ne pourrons pas réduire massivement les besoins en eau." (ibidem)

 

Le levier insuffisant et mal contrôlé de l'efficacité

 

"L'amélioration des techniques est toujours bonne à prendre, mais elle représentera, au mieux des économies , de l'ordre de 10 à 15%. Et pour qu'elle soit efficace, il faut que tout le monde adopte les bonnes pratiques." Or, "même dans les bassins comme celui d'Adour-Garonne, où cela fait très longtemps que l'on pratique l'irrigation, il est quasiment impossible d'avoir des données précises sur les quantités d'eau utilisées par hectare." (ibid.)

 

Des priorités à afficher

 

"Dans nos scénarios sur l'alimentation et l'agriculture en 2050, https://afterres2050.solagro.org/

nous défendons l'idée de rajouter 100 000 à 150 000 hectares de maraîchage, car nous sommes aujourd'hui très dépendants des importations mondiales. Pour cela, il faudra irriguer. Pareil pour les vergers. Il faut donc établir des priorités : priorité aux productions agricole destinées directement à l'alimentation humaine, et moins à celles destinées à l'alimentation animale." (ibid.)

 

Une transition insuffisamment engagée et une mal-adaptation sans issue

"S'il y a un deuxième été comme celui de 2022, ce sera la catastrophe, personne n'a anticipé de tels chocs. Il y a peu ou pas de stratégie collective d'adaptation à la hauteur des enjeux, chacun fait ce qu'il peut. (...) Ce sujet peut déclencher des motivations à agir, mais le mouvement peut prendre deux directions. Soit une approche technique, qui consiste à essayer de "réparer" le problème avec des solutions palliatives pour prolonger le système actuel. Cette voie crée un risque de "mal-adaptation", c'est-à-dire d'investissements dans des équipements qui ne seront plus efficaces dans quelques années. Ou on peut adopter une approche réellement systémique, qui prenne en compte la biodiversité, le climat, l'eau, la sécurité alimentaire." (ibid.)

 

Une autre politique est nécessaire

 

Tant l'avenir de notre agriculture que celui de la résilience collective de nos sociétés, et notamment la santé publique, commandent une réelle transition vers un nouveau modèle alimentaire et agricole.

Le recul de la viande dans notre alimentation n'est pas une lubie d'écolo, mais une nécessité objective dont il faut prendre toute la mesure.

En refusant d'aborder cet aspect décisif de la question de l'eau, le Président est passé totalement à côté du sujet.

 

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