L'importance de la vérité en politique
L'importance de la vérité
en politique.
Commençant un cycle de lectures autour des guerres de religion en France, à partir de celle, passionnante et dont j'ai déjà parlé, du livre novateur de Jérémie FOA, je tombe sur ce commentaire de l'engagement politique de Montaigne par Antoine Compagnon :
"La mode est à Machiavel et au réalisme politique, incarné en Catherine de Médicis, la fille de Laurent II, à qui Machiavel avait dédié Le Prince.(...)
Le machiavélisme autorise à mentir, à trahir sa parole, à tuer, au nom de l'intérêt de l'Etat pour assurer sa stabilité, conçue comme le bien suprême. Montaigne ne s'y est jamais résolu. Il refuse partout la tromperie et l'hypocrisie. Il se présente toujours tel qu'il est, dit ce qu'il pense, au mépris des usages. À la voie couverte, comme il l'appelle, il préfère la voie ouverte, la franchise, la loyauté. Pour lui, la fin ne justifie pas les moyens, et il n'est jamais prêt à sacrifier la morale privée à la raison d'État.
Or il constate que cette conduite insensée ne lui a pas porté préjudice et qu'elle lui a même plutôt réussi. Sa conduite est non seulement plus honnête, mais aussi plus utile. Quand un homme public ment une fois, il n'est plus jamais cru (NB : c'est moi qui souligne); il a choisi un expédient contre la durée; il a donc fait un mauvais calcul." ("Un été avec Montaigne", Edtions des Equateurs- France Inter, avril 2013, p 11).
Outre que les intentions de Machiavel https://vert-social-demo.over-blog.com/2015/05/machiavel-et-son-bon-usage.htmldans l'écriture du Prince (comme d'ailleurs celles de La Boétie dans celle du Discours de la servitude volontaire, souvent présenté comme "l'anti-Prince", j'y reviendrai) me semblent avoir été déformées par la postérité, cette attitude de Montaigne me semble la plus intéressante par le constat opposé que j'ai souligné.
Nous vivons en effet des temps de méfiance rarement atteinte vis-à-vis des "hommes publics". Et cela repose en effet sur ce "péché originel" du mensonge démasqué, d'autant plus facile à démasquer aujourd'hui de par l'omni-commentaire de toute déclaration publique permis par les immenses possibilités de l'Internet et du tout-numérique.
De là le parti pris, que pour ma part j'observe le plus scrupuleusement possible, de la sincérité, de la loyauté et du refus du mensonge. C'est, aujourd'hui plus que jamais, et en dépit du climat cynique et désabusé qui nous entoure, le gage d'une véritable efficacité politique.
"La naïveté et la vérité pure, en quelque siècle que ce soit, trouvent encore leur opportunité et leur mise." (Montaigne, Les Essais, livre 3, chapitre 1 : "De l'utile et de l'honnête")