Russie-Ukraine : comment Mélenchon réécrit l'Histoire

Publié le par Henri LOURDOU

Russie-Ukraine : comment Mélenchon réécrit l'Histoire

 

Tout le monde peut se tromper : Mélenchon, comme beaucoup d'autres, était persuadé que jamais Poutine n'interviendrait militairement contre l'Ukraine.

Soit.

Mais une fois confronté à la réalité de l'invasion brutale de l'Ukraine par les troupes russes, ne voilà—t-il pas qu'il joue à nouveau au géopolitologue ultra-lucide en nous affirmant que tout soutien militaire à la résistance ukrainienne ne peut déboucher que sur une montée aux extrêmes nucléaire, et qu'il faut donc creuser exclusivement la piste diplomatique, seule sortie possible de la crise.

Certes.

Mais cela présuppose que Poutine accepte de s'engager, lui, dans cette voie...en retirant ses troupes d'Ukraine.

Il faut donc justifier qu'il aurait de bonnes raisons de le faire. Et c'est ici qu'intervient la réécriture de l'Histoire par JLM.

Quand il écrit dans son discours à l'Assemblée nationale du 1er mars que la question de la sécurité de chaque nation en Europe "est restée ouverte après l'implosion de l'URSS, puisque pour la première fois dans l'histoire contemporaine un empire s'est effondré sans qu'on discute les nouvelles frontières", il fait preuve soit d'une ignorance phénoménale, soit d'une mauvaise foi abyssale.

En effet, la question des nouvelles frontières a bien été traitée par un ensemble de traités bilatéraux entre la fédération de Russie et ses voisins. Et en particulier entre la Russie et l'Ukraine.

 

Le traité réglant la succession de l'Union soviétique

 

L'Acte constitutif de la Communauté des Etats indépendants (Traité de Minsk - 8 décembre 1991) qui a organisé la succession de l'URSS, a garanti aux nouveaux Etats en 1991, le respect de leurs frontières, la Russie renonçant à les contester. D'ailleurs l'Ukraine, contrairement à d'autres en Europe, avait gardé toujours l'apparence de son indépendance et disposait d'un siège au sein de l'ONU, même si elle n'avait le choix que de voter comme l'URSS.

 

Les traités et accords bilatéraux signés avec l'Ukraine

 

L'accord d'amitié signé entre la Russie et l'Ukraine le 31 mai 1997 mettait spécifiquement l'accent sur le respect des frontières, ce qui prouve qu'il a été signé en parfaite connaissance de cause, car nul n'ignore l'histoire de la colonisation de la Crimée qui s'est traduite par son annexion en 1783 et la décision du Plenum du Comité central de l'URSS de 1954, la rattachant à l'Ukraine "du fait de (leurs) liens économiques particuliers".

L'accord sur la présence de la flotte russe, signé le 28 mai 1997 et renouvelé en 2010, organisait la répartition des navires de l'ex-URSS contre un dédommagement de 526 millions $, confirmait l'appartenance à l'Ukraine de ce territoire dont les facilités navales étaient louées à la Russie, contre un loyer annuel de 97 millions $, et précisait les conditions de stationnement des troupes russes (25 000 hommes, 132 véhicules blindés, 24 pièces d'artillerie).

 

https://www.robert-schuman.eu/fr/questions-d-europe/0344-la-russie-l-ukraine-et-le-droit-international

 

La question de la dénucléarisation de l'Ukraine a quant à elle été réglée par un accord mulitilatéral :

Le mémorandum de Budapest (5 décembre 1994) , conclu entre la Russie, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l'Ukraine , dont la France et la Chine sont aussi les garants comme "témoins", a permis la dénucléarisation de l'Ukraine, qui hébergeait le plus formidable arsenal nucléaire (1800 têtes nucléaires), contre la garantie expresse de ses frontières. Signé de tous les membres permanents du Conseil de Sécurité, appliqué à grands renforts de moyens coûteux, financés principalement par les Etats-Unis mais scrupuleusement et entièrement, ce texte était aussi, dans le contexte de l'époque, un message adressé aux Etats qui caressaient des velléités nucléaires et qui, sous la pression de la communauté internationale unie, ont accepté d'y renoncer au cours des mêmes années 90. L'Afrique du Sud, le Brésil, la Libye et d'autres encore, ont ainsi renoncé à l'arme nucléaire. Alors que les mêmes efforts tendent à convaincre l'Iran de suivre leur exemple, on mesure ici l'ampleur des conséquences potentielles de la violation de ce traité par un Etat membre du Conseil de Sécurité de l'ONU, qui s'était engagé, à titre bilatéral comme multilatéral à les garantir.
Non seulement la garantie, la parole et la signature de la Russie s'en trouvent durablement affaiblies, mais il en va de même de celles des plus grandes puissances de la planète, voire de l'ONU elle-même.

https://www.robert-schuman.eu/fr/questions-d-europe/0344-la-russie-l-ukraine-et-le-droit-international

 

C'est donc bien l'initiative unilatérale de la Russie d'annexer la Crimée et de soutenir une guerre hybride dans le Donbass en 2014 qui a initié le processus de rapprochement de l'Ukraine avec l'Otan, et non, à l'inverse la "volonté d'expansion de l'Otan" (JLM).

 

Encore une fois, JLM réécrit l'Histoire pour qu'elle rentre entre ses oeillères idéologiques.

Ce n'est pas ce qu'on attend d'un futur président de la République.

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