Philip KERR Métropolis
Philippe KERR
Métropolis
roman traduit de l'anglais par Jean ESCH
Seuil, novembre 2020, 392 p.
Avec ce roman se clôt le cycle des aventures de Bernie Gunther, policier de la Kripo de Berlin entraîné dans la tourmente nazie.
Publié à titre posthume, comme le précédent, il a la particularité d'ouvrir le cycle, alors que ce dernier le closait chronologiquement.
Nous sommes en 1928 à Berlin. Le sergent Bernhard Gunther vient d'être recruté à la prestigieuse Kripo, le service des enquêtes criminelles du Polizei präsidium, quartier général de la police situé Alexanderplatz,après quelques années passées au service des "moeurs", et après avoir débuté à la circulation. Gunther a vu ses études interrompues par la guerre alors qu'il venait de passer son Abitur (équivalent du bac). Ancien combattant, il reste comme tous les autres traumatisé par ses quatre ans passés dans les tranchées.
Le chef de service qui le recrute, Bernhard Weiss, est également un ancien combattant. Il s'agit, contrairement à Bernie, personnage de fiction, d'un personnage réel dont la biographie, comme à l'accoutumée, est résumée en fin de volume.
Comme je l'ai déjà évoqué, le mélange de fiction et de réalité historique est l'un des principaux attraits de cette série.
Nous sommes à la veille de la grande crise économique de 1929, mais l'ambiance reste apocalyptique. Contrairement à une vision rétrospective de la République de Weimar, ce régime reste très largement contesté et le pays traumatisé par le double désastre de 1918-19 (la défaite militaire et la révolution communiste manquée et lourdement réprimée) suivi de l'occupation de la Ruhr et de l'hyperinflation de 1923. Surtout, et c'est ce qui constitue l'un des deux leitmotiv du livre, les invalides de guerre peuplent les rues. C e qui est l'occasion d'évoquer leur triste condition et leur traitement parfois brutal dans des institutions qui relèvent davantage du mouroir que de l'établissement de soins.
L'autre leitmotiv du livre est la prostitution occasionnelle à laquelle se livrent de nombreuses jeunes femmes sous-payées dans leur travail.
Rien d'idyllique donc dans cette période réputée faste, où se développe pourtant un art nouveau, le cinéma, ici évoqué à travers la scénariste et seconde épouse de Fritz Lang, Thea von Arbou. Elle commence l'écriture de M le Maudit, après avoir livré celui du célèbre Métropolis, qui donne donc son nom au livre. Pour cela elle a besoin de se documenter auprès de policiers.
Bernie croise également la troupe qui va donner l'Opéra de Quat'Sous, en pleine répétition.
Il loge chez une veuve dont le vaste appartement est devenu trop cher à entretenir, avec d'autres colocataires.
Et là-dessus, bien sûr se met en place une série de crimes à résoudre...
Une lecture toujours aussi passionnante , avec une morale toujours aussi ambivalente...