Emma GOLDMAN Vivre ma vie

Publié le par Henri LOURDOU

Emma GOLDMAN Vivre ma vie
Emma GOLDMAN Vivre ma vie

Emma GOLDMAN

Vivre ma vie

Une anarchiste au temps des révolutions

(L'Échappée, 4e trimestre 2018, 1096 p.

Traduit de l'anglais par Laure BATIER et Jacqueline REUSS).

 

À quelque chose malheur est bon : coincé depuis une semaine par un lumbago, j'ai pu me plonger enfin dans ce gros pavé.

Je ne l'ai pas regretté. La vie d'Emma GOLDMAN (1869-1940) et sa façon de la raconter sont également passionnantes.

 

Il me faut tout d'abord comparer cet écrit avec ceux de son vieux copain Alexandre BERKMAN (1870-1936) , omniprésent dans ce récit sous son petit nom de Sasha.

Ce qui les rapproche est une sincérité absolue, qui ne recule devant aucun tabou ou amour-propre mal placé : l'un comme l'autre fait part de ses erreurs ou ses échecs, de ses changements de point de vue.

C'est aussi, et c'est lié, une grande ouverture aux autres qui leur permet de comprendre les points de vue différents et de les analyser du point de vue du vécu et des sentiments : on a droit dans les deux cas à de nombreux portraits d'une grande finesse psychologique, qui ne cèdent jamais au manichéisme qu'on attendrait de personnes aussi radicales.

Car c'est également une grande continuité dans leurs convictions profondes : celles d'un anarchisme social et égalitaire , qui ne transige ni sur l'autonomie individuelle, ni sur la cause des opprimés et des exploités. Une rigueur morale toujours en éveil qui leur a fait choisir l'intransigeance dans des situations difficiles où l'essentiel était en jeu, là où bien de leurs compagnons cédaient à la panique ou à l'air du temps.

Ce fut le cas dans deux grandes occasions : lorsqu'ils refusèrent l'entrée en guerre des États-Unis en 1917, puis devant la confiscation de la révolution russe par les bolchéviks en 1920-21.

Le recul historique leur donne entièrement raison dans les deux cas.

 

Par contre, relevons aussi ce qui les distingue : une certaine raideur chez Berkman, traduisant une réticence à suivre ses sentiments, et donc une forme d'abstraction ou d'intellectualisation pour prendre de la distance par rapport à une sensibilité que l'on devine extrême. Ce recul est l'occasion de nombreux frottements entre eux. Car Emma n'hésite pas, elle, à suivre intuitivement sa sensibilité , d'où son goût prononcé pour la musique, la danse ou le théâtre, auxquels elle n'hésite pas à consacrer beaucoup de temps; d'où aussi ses nombreuses aventures amoureuses (qu'elle analyse pourtant, rétrospectivement, avec beaucoup de lucidité).

Cette grande spontanéité dans l'expression des sentiments explique sans aucun doute la multiplicité des amitiés nouées par Emma : elle semble susciter partout la sympathie, et attire de ce fait des gens eux-mêmes sympathiques, dont elle nous livre de nombreux portraits attachants.

Cela n'empêche pas Berkman de susciter lui aussi de nombreuses et tout aussi fidèles amitiés, mais c'est davantage pas son action militante d'organisateur hors-pair que par des liens individuels basés sur des goûts communs comme pour Goldman, davantage capable de se lier avec des gens qui ne partagent pas ses idées et de milieux très divers.

 

Les deux morceaux de bravoure de cette autobiographie tournent bien cependant autour de l'action militante. Ce sont la campagne menée en commun avec Berkman contre la guerre et la mise au pas du mouvement ouvrier américain en 1917-19, et le séjour en URSS consécutif à leur expulsion des États-Unis (où ils ne pourront jamais revenir après y avoir pourtant vécu trente ans) en 1920-21.

Je me contenterai de résumer le second, puis d'y ajouter des remarques sur les différences entre mouvement ouvrier américain et européen avant 1914. Car ce livre est évidemment trop riche pour être résumé en peu de pages.

 

L'échec de la révolution russe et ses causes

 

Ces mémoires s'arrêtent en 1928 : elle et Sasha, partis volontairement d'URSS début 1922 se heurtent alors à la force du "mythe bolchévik" en Occident, mythe que pourtant ils sont partis pour dénoncer, mais surtout pour défendre les révolutionnaires ensevelis dans le silence du Goulag.

Expulsés des USA pour avoir défendu les bolchéviks, ils étaient pourtant partis pleins d'espoir : la révolution d'octobre, réalisée conjointement par les bolchéviks, les socialistes révolutionnaires (SR) de gauche et les anarchistes leur semblait réaliser les aspirations du peuple et de l'intelligentsia progressiste russes depuis cent ans.

Voici ce qu'écrit Emma lors de leur arrivée , le 19 janvier 1920 : "Ô rêve radieux, ô foi brûlante ! Ô Matouchka Rossiya (Maman Russie) , renaissant dans l'enfantement de la révolution, purgée par elle de la haine et des querelles, libérée pour atteindre la vraie humanité et tout embrasser. Je me consacrerai à toi, Ô Russie !" (p 1011)

Près de deux ans plus tard, le bilan est sans appel : "Dans le train, le 1er décembre 1921 ! Mes rêves anéantis, ma foi brisée, mon coeur comme une pierre. Matouchka Rossiya saignant de mille blessures, son sol jonché de morts." (ibidem)

Elle et Berkman avaient pourtant commencé de bonne foi à vouloir mettre toute leur énergie et leur savoir-faire au service de la révolution. Mais ils se heurtent très vite à la volonté bolchévik de contrôle total, impulsée d'en haut par Lénine et Trotsky. Celle-ci se traduit par une incroyable inflation bureaucratique faite de la prolifération emblématique des "propouski"(laissez-passer) indispensables pour le moindre déplacement.

C'est le corollaire d'une omniprésence militaire, comme ils le découvrent dès leur arrivée à Pétrograd : "Nous filons à vive allure, nous arrêtant uniquement devant des formes humaines qui plusieurs fois surgirent brusquement des ténèbres. C'était des soldats lourdement armés qui braquaient leurs torches scrutatrices sur nous et qui demandaient sèchement : "Propousk, tovaritch !". "Mesures de sécurité militaires, nous expliqua notre guide. Pétrograd vient tout récemment d'échapper à la menace de Ioudénitch. Nous ne pouvons pas prendre le moindre risque avec tous les contre-révolutionnaires qui rôdent partout." Poursuivant notre chemin, la voiture tourna au coin de la rue et, lorsqu'elle passa devant un bâtiment bien éclairé, Zorine observa : "La Tchéka et notre prison – bien qu'elle soit habituellement vide." " (p 806)

La suite leur montrera cependant que les "propouski" vont bien au-delà des "mesures de sécurité militaires" , et, surtout, que la Tchéka, omnipotente, remplit bien ses prisons. Et notamment de militants révolutionnaires qui ont le tort principal de ne pas être au Parti.

A cela s'ajoute la double tare des règlements impossibles à appliquer, et donc contre-productifs, et de la corruption généralisée qu'ils alimentent. Une double tare qui sera jusqu'au bout la marque de ce système.

Et le tout se ramène au fond à cette volonté centraliste de tout contrôler, incarnée par la figure tutélaire de Lénine.

La seule rencontre rencontre d'Emma et de Sasha avec celui-ci donne lieu à un chef d'oeuvre d'observation psychologique. Elle décèle "sa perception rapide de ce qu'il pouvait tirer des autres et son habileté à en tirer le maximum à son avantage." (p 845) et elle en ressort convaincue "qu'il savait tout ce qui se passait en Russie. Rien n'échappait à son oeil pénétrant, rien ne pouvait se produire sans avoir été d'abord pesé à son aune et frappé de son sceau approbateur. Une volonté indomptable pouvait faire plier tout le monde facilement et briser tout aussi facilement les hommes qui ne se soumettaient pas." ( p 849)

Venus lui présenter une demande de libération des anarchistes emprisonnés arbitrairement, ils en repartent avec son approbation enthousiaste à leur projet de "société des amis russe de la liberté américaine" pour soutenir les victimes de la répression anti-ouvrière aux Etats-Unis... sans qu'il se soit prononcé formellement sur la libération des anarchistes russes !

Ils en concluent d'un commun accord qu'ils ne doivent surtout pas mettre le doigt dans une dépendance quelconque vis-à-vis de la machinerie du nouvel État "prolétarien". Ils sont confortés dans ce choix par la visite qu'ils rendent à leur maître Kropotkine, qui a adopté la même attitude d'indépendance, et qui vit pour cela dans la précarité à Dmitrov dans la lointaine banlieue de Moscou.

Tout au long de leur séjour, ils préserveront leur indépendance économique grâce aux précieux dollars qu'ils ont ramené des États-Unis. Grâce à cela , ils peuvent s'engager librement dans les activités qu'ils choisissent. Et c'est ainsi qu'ils font le choix, après diverses tentatives de projets plus "sociaux" entravés par la mauvaise volonté ou l'inefficacité bureaucratiques, de s'investir dans le projet de musée de la Révolution de Pétrograd, plus à l'écart du " centre" moscovite. Ce projet a l'avantage d'être menés par une équipe majoritairement composée de révolutionnaires indépendants, non assujettis au Parti.

En outre, il leur permet, moyennant l'obtention des "propouski" nécessaires, de circuler dans le pays pour y recueillir des archives.

C'est ce contact prolongé avec le pays réel qui amène Emma à conclure, avant Sasha, qui essaie jusqu'au bout de se convaincre que ce n'est pas irrémédiable, au divorce total entre la révolution et le pouvoir bolchévik.

Objet de débat permanent entre eux, cette conclusion devient commune après l'écrasement militaire de la Commune de Cronstadt, malgré leur tentative désespérée de médiation, le jour-même du cinquantenaire de la Commune de Paris, le 18 mars 1921.

Car, jusque-là, "Dans les heures les plus sombres de nos tâtonnements, nous découvrions souvent, derrière la façade officielle du régime, l'endurance et le dévouement les plus héroïques. Rien à voir avec ce qui était acclamé publiquement chaque jour et célébré par des manifestations voyantes et des parades militaires, version officielle dans laquelle personne en-dehors du parti ne croyait. Même au sein de celui-ci, beaucoup de ses membres haïssaient cette grandiloquence et cette prétention creuses, mais ils étaient impuissants contre la machine. Ils remplaçaient cette ostentation vulgaire par leur propre ténacité et leur probité (...) Ces grandes âmes rachetaient à nos yeux beaucoup de ce qui était haïssable dans le régime soviétique.' (p 866)

Dans ces aspects haïssables, le ressentiment de certains prolétaires vis-à-vis des intellectuels "bourgeois" considérés comme des parasites sentimentaux. Ce sont ces nouveaux bureaucrates prolétariens, adeptes des solutions expéditives, et souvent corrompus, qui donnent sa base sociale au régime. Avec une double coloration de brutalité et de mépris pour la culture et l'art.

Le seul point positif, mais très ambivalent, voire ambigu, noté en Ukraine, à mettre à l'actif du régime : le coup d'arrêt donné aux pogroms. Comme le soulignent eux-mêmes certains des Juifs rencontrés, les exactions du régime (réquisitions forcées, corruption et répression aveugle des Tchékas) sont du coup mises au compte des Juifs (p 916) , et d e plus, ceux-ci ne bénéficient d'aucun droit à l'auto-organisation et à l'auto-défense (p 936).

Egalement, comme déjà noté dans le livre de Berkman, la glorieuse exception de la région du Nord (Arkhangeslsk) où ne règne pas le climat habituel de suspicion et de répression généralisées (p 942).

On croise, entre autres révolutionnaires dissidents réprimés, la figure exceptionnelle de Maria Spiridonova, enfermée ensuite par la Tchéka, suite à une rafle, et non exécutée en raison de sa grande popularité dans la paysannerie...mais jamais libérée malgré de nombreuses demandes, en raison de la peur qu'elle inspire notamment à Trotsky (pp 882-5 et 998-9).

On a le sentiment, à travers les nombreuses rencontres d'Emma et Sasha, d'un mouvement anarchiste présent partout et très actif, à côté de celui , encore plus important des SR de gauche, dont fait partie Spiridonova, dans les campagnes, et des menchéviks, dans les villes, tous soigneusement éradiqués par le parti communiste au plus haut niveau. Et d e militants très loin de l'image de bandits violents et irresponsables décrits par la presse officielle.

Quant aux militant sincères du parti, le constat est celui d'un écrasement de leur volonté de protester, notamment à l'occasion de Cronstadt : "Ces amis communistes passèrent des nuits entières à parler avec nous – à parler, parler – mais aucun d'entre eux n'osa élever la voix pour protester ouvertement." (p 968)

Et cela pour une simple raison : la peur. Peur d'être exclus et de perdre travail et rations, pour eux et leur famille, voire peur d'être carrément liquidés.

Entre cette peur à l'intérieur et la fascination hypnotique à l'extérieur, le mythe bolchévik, selon le titre donné par Berkman à son livre, avait des réserves pour tenir la route un certain temps.

Nous sortons à peine de cette paralysie de la pensée (réactivée hélas par la persécution postérieure d'un Trotsky, comme on le voit par exemple dans le très beau livre de Patrick Deville "Viva").

Raison de plus pour y revenir sans cesse et sans concession.

 

Les spécificités des mouvements ouvriers américain, hollandais et français

 

Arrivée aux États-Unis à seize ans en 1885, Emma s'engage dans le mouvement anarchiste new-yorkais suite à la pendaison des 4 martyrs de Chicago le 11 novembre 1887, un événement traumatisant à la source de nombreux engagements comme le sien, et sur lequel elle revient régulièrement.

Ouvrière couturière, elle fait la rencontre dans ce milieu anarchiste yiddish new-yorkais de l'East Side du jeune intellectuel d'origine bourgeoise Alexandre Berkman, arrivé de Russie (Lituanie, comme elle) en février 1888, et d'un an son cadet. Un véritable coup de foudre à la source d'une amitié qui durera pour la vie.

Ils partagent une même culture, celle de l'intelligentsia révolutionnaire russe faite d'intransigeance, d'empathie pour le peuple et ses souffrances et de pureté morale, et une même conviction anarchiste de refus de tous les préjugés.

C'est cette disposition d'esprit qui est à l'origine du projet qui va déterminer leur destin : l'attentat raté de Berkman contre le patron des aciéries Carnegie à Homestead près de Pittsburgh en soutien à la grève violemment réprimée de ses ouvriers.

Cette tentative, payée de quatorze ans de prison, va amener Emma à voler de ses propres ailes. Et l'un comme l'autre à remettre en question l'intérêt des actions violentes pour leur cause. Ce qui ne les empêche pas de se solidariser avec ceux, tel le jeune Léon Czolgosz, qui assassine le président McKinley en 1901, qui n'ont pu mener au bout la même réflexion.

Son militantisme de conférencière quasi-professionnelle l'amène non seulement aux quatre coins des États-Unis mais aussi en Europe à différentes reprises. Ainsi après avoir passé un an en prison en 1893-4 pour un discours aux chômeurs tenu à Union Square à New York, elle part en 1895-6 à Vienne pour terminer les études d'infirmière qu'elle avait entamées en prison, et en profite pour faire une tournée de meetings à Londres, où elle rencontre Errico Malatesta et Louise Michel, puis Pierre Kropotkine. Elle y retourne en 1900 ainsi qu'à Paris, où elle rencontre Victor Dave, militant méconnu de l'anarchisme français (p 312-3) ainsi que les militants néo-malthusiens qui préconisent la "procréation consciente" et donc la contraception. Puis en 1907 pour le congrès international anarchiste d'Amsterdam.

De ces voyages, elle tire en particulier des comparaisons sur les conditions de l'action militante dans ces différents contextes.

Ainsi en 1907, "le fait qu'un congrès anarchiste international fût autorisé à se réunir tout-à-fait ouvertement en Hollande monarchique mais interdit en Amérique démocratique et en France républicaine en disait long sur ces deux dernières (...)

Plus remarquable encore était l'attitude de la presse d'Amsterdam. Même les journaux les plus conservateurs nous traitaient non comme des criminels ou des fous mais comme un groupe de gens sérieux qui s'étaient réunis dans un but sérieux. Bien qu'opposés à l'anarchisme, ces journaux ne nous présentaient pas sous un faux jour et ne déformaient pas les propos tenus lors de nos séances." (p 457)

De la même façon, Emma est amenée à comparer l'attitude des ouvriers d'Amsterdam par rapport à ce qu'elle a connu aux États-Unis : "je constatais le décalage entre l'indépendance des ouvriers néerlandais – en dépit de leur monarchie – et l'Amérique démocratique où la majorité des gens connaissaient fort peu cet esprit. Plusieurs policiers s'étaient faufilés dans la réunion, mais le comité ne tarda pas à les démasquer et les expulsa sans ménagement. Je ne pus m'empêcher d'opposer cette démonstration de zèle à son absence dans les syndicats américains, terriblement infestés par la peste des agents de Pinkerton." (p 460)

Enfin son passage en France est l'occasion d'assister à un procès de neuf jeunes antimilitaristes, dont une fille, pour une distribution de tracts appelant des soldats à retourner leurs armes contre leurs supérieurs plutôt que de réprimer leurs frères prolétaires. "Certes, les prisonniers furent déclarés coupables et condamnés à de courtes peines, trois ans pour la plus longue. La jeune fille (...) fut tout simplement remise en liberté. Dans mon pays adoptif, ils auraient subi un châtiment infiniment plus sévère, et on les aurait sans nul doute accusés de surcroît d'outrage à magistrat pour avoir avoué franchement leurs opinions et leurs actes et avoir couvert de ridicule le juge et l'avocat général.

Il me vint à l'esprit que derrière les différences entre procédures judiciaires américaine et française se cachait une différence fondamentale d'attitude envers la révolte sociale. Les Français savaient depuis leur révolution que les institutions ne sont ni sacrées ni inaltérables et que les conditions sociales peuvent se modifier. Ce qui explique qu'en France les rebelles soient considérés comme les précurseurs de bouleversements futurs.

En Amérique en revanche, les idéaux de la révolution sont morts – des momies auxquelles il ne faut pas toucher. D'où la haine et la condamnation que rencontre le rebelle social et politique aux États-Unis." (p 463)

 

Ces observations sociales et historiques donnent encore à penser pour aujourd'hui.

 

Au final, un livre très riche à lire et à relire. A compléter par ce que nous pouvons savoir de la vie d'Emma Goldman après 1931, date à laquelle elle met fin à son tapuscrit après près de trois ans de travail. Voir à cet égard le n° 8 de la revue libertaire "Itinéraire", disparue en 1998, "Itinéraire", du 2e trimestre 1990, qui comporte notamment une chronologie et une riche iconographie.

 

 

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