Antisionisme = antisémitisme ? Pas si simple !

Publié le par Henri LOURDOU

Antisionisme = antisémitisme ? Pas si simple !
Antisionisme = antisémitisme ? Pas si simple !
Antisionisme = antisémitisme ? Pas si simple !
Antisionisme = antisémitisme ? Pas si simple !

Antisionisme = antisémitisme ?

Pas si simple !

 

La défaite électorale sans appel du Labour party de Jeremy CORBYN, accusé notamment et non sans arguments de tolérer en son sein l'expression d'une rhétorique antisémite, aux dernières élections britanniques, a réanimé une vieille polémique, à laquelle Jean-Luc MÉLENCHON, qui a une fois de plus perdu l'occasion de réfléchir avant de parler, a ajouté son grain de sel.

Dans "Le Monde" daté des 15-16/12/19, Shany MOR, "chercheur associé au Hannah Arendt Center for Politics and Humanities du Bard College de New York, nous assure qu' "une forme d'antisionisme place Israël au coeur du mal" (titre de sa tribune, dont le chapeau résume ainsi le propos : "Cette doctrine, qui s'est développée depuis la création d'Israël, remet en cause son existence-même en jouant sur les ressorts traditionnels de l'antisémitisme."

Or, dès la première phrase de son article, le titre restrictif ("une forme d'antisionisme") est aussitôt démenti par l'affirmation que définir l'antisionisme est chose facile en enchaînant cette affirmation avec celle que "le sionisme est le mouvement de libération nationale du peuple juif". Il s'ensuit donc pour lui que contester le sionisme c'est contester "le droit (du peuple juif) à l'autodétermination dans sa patrie historique."

Sans occulter les controverses auxquelles a donné lieu ce mouvement au sein du monde juif tout comme au sein du territoire d'Israël, l'auteur conclut que "La question a été tranchée et l'État d'Israël existe depuis maintenant soixante et onze ans."

Faut-il donc en conclure que le débat n'a plus lieu d'être sur toutes les affirmations précédentes ? Le sionisme est-il bien "le mouvement de libération nationale du peuple juif ?", la Palestine est-elle bien "la patrie historique" de ce peuple ?

Si l'existence de l'État d'Israël est bien un fait indéniable, sa constitution et sa situation actuelle ne renvoient pas pour autant à ce schéma simpliste et faussement rassurant.

Car, bien évidemment, et pour commencer, l'existence de "minorités non juives en Israël" tout comme "le statut des minorités juives en-dehors d'Israël" ou les "divers autres conflits relatifs à la religion, aux frontières, à la langue, aux migrations et autres" (sic) n'ont rien de fortuit ni de marginal !

Comme me l'avait fait découvrir dès 1970 Uri Avnery dans son ouvrage significativement titré "Israël sans sionisme", la question du confessionnalisme constitutif de l'État d'Israël, rappelé récemment avec force par ce film magnifique de Shlomi et Ronit ELKABETZ "Le procès de Viviane Amsalem" (2014),https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Proc%C3%A8s_de_Viviane_Amsalem

pose la question de la laïcisation et donc de la nature artificielle d'un "projet national" qui ne se fonde de plus en plus que sur la religion... alors qu'il a été au départ porté par des militants socialistes et laïcs !

L'historien israélien Shlomo SAND, dans un travail méthodique et rigoureux, a bien déconstruit tout le caractère profondément artificiel et aliénant de cette entreprise nationaliste, qui justifie aujourd'hui la colonisation et le racisme et corrode de plus en plus les fondements démocratiques et libéraux de l'État.

Il faut ici saluer les courageux Israéliens, tout aussi minoritaires et stigmatisés que ceux qui en France luttèrent contre la guerre d'Algérie en 1954-62, qui s'opposent aujourd'hui à la colonisation, au racisme et aux discriminations symbolisés par l'érection du mur entre Israël et les Palestiniens confinés dans leurs "bantoustans" à l'heure de ce nouvel "apartheid".

Dès lors, interroger la pertinence du projet sioniste n'a strictement rien à voir avec l'antisémitisme.

Que, parallèlement , certains antisionistes utilisent la rhétorique traditionnelle de l'antisémitisme (complotisme, accusation de meurtres rituels, etc...) n'est pas niable.

Cela n'autorise pas pour autant à faire un amalgame entre antisionisme et antisémitisme. Tout au plus cela doit inciter les antisionistes à la vigilance sur les arguments qu'ils utilisent et la façon dont ils peuvent être interprétés.

 

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