Retraites : entre un statu quo injustifiable et une réforme impossible

Publié le par Henri LOURDOU

5 décembre 2019

5 décembre 2019

Retraites : entre un statu quo injustifiable

et une impossible réforme, quel chemin de progrès ?

 

En 1945, la mise en place d'un système universel de retraites prônée par le rapport Laroque a été repoussée. Repoussée à la fois par ceux qui bénéficiait déjà d'un régime spécial satisfaisant, et par ceux qui refusaient le principe d'une mutualisation solidaire et des cotisations élevées que cela supposait.

Aujourd'hui, le patchwork des 42 régimes existants craque de toute part. La démographie de certaines professions a obligé à la mutualisation des cotisations que certains refusaient autrefois : sinon leurs pensions ne pourraient plus être servies. D'autre part, des carrières de moins en moins linéaires multiplient le nombre des polypensionnés émargeant à plusieurs régimes différents ...et disposant au final de moins de droits que leurs années de travail n'auraient laissé espérer. Les femmes, victimes du travail partiel imposé et de carrières interrompues, sont aussi les victimes de ce statu quo.

Au final, le manque total de transparence du système a généré soupçons, jalousies et peur de l'avenir.

L'idée d'un système universel à bâtir revient donc à l'ordre du jour.

Le débat entre système à points (1 euro cotisé donne les mêmes droits à tous en fonction des ressources collectées) et système à prestation définie (une annuité donne des droits indépendants des ressources collectées) est un débat très technique qui pose plus de questions qu'il n'apporte de réponses .

Le travail de la commission Delevoye a rapidement montré que le principe contributif du régime à points impliquait forcément une partie non-contributive basée sur la solidarité pour les "accidents de la vie", mais aussi sur la pénibilité du travail et les contraintes particulières. Il remet également au devant de la scène les choix implicites de politique salariale, comme pour les enseignants, dont le régime de retraite compensait la modestie des carrières.

La défense du système à prestation définie implique de répondre à la question des ressources à trouver en permanence pour répondre aux besoins de financement liés à la démographie (de moins en moins de cotisants par rapport au nombre de pensionnés).

Quel que soit le système choisi, il pose des problèmes à résoudre.

 

Quoi qu'il en soit, la construction d'un système universel implique un climat de confiance entre partenaires qui, à l'évidence, n'existe pas aujourd'hui.

Alors que le hold up de l'Etat sur la Sécurité sociale dans le projet de loi de financement pour 2020, tout comme l'inique réforme de l'assurance chômage mettent en doute la crédibilité sociale du gouvernement et de sa majorité. Alors que la mise en place du CSE et la nouvelle loi Fonction Publique calquée dessus réduisent drastiquement les moyens des institutions représentatives du personnel et des organisations syndicales de salariés, comment penser que ce gouvernement puisse disposer du consensus nécessaire à une telle réforme ?

 

Il n'est donc pas étonnant que la journée de protestation du 5 décembre s'annonce massive.

Il n'en reste pas moins que la question d'un futur régime universel de retraites à la fois juste, transparent et bien financé, reste posée.

Elle sera sur la table d'une future majorité socialement crédible. Car le progrès social reste possible...à condition d'en débattre les conditions sans faux-fuyants ni démagogie.

Au-delà de la protestation, il reste à nous rassembler sur les vrais enjeux.

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