La Chine 30 ans après le massacre de Tian An Men

Publié le par Henri LOURDOU

La Chine 30 ans après le massacre de Tian An Men

"La Chine m'inquiète" (attribué au général De Gaulle, 1891-1971)

"La Chine doit nous inspirer solidarité et espoir ! " (moi, 9 juin 2019)

 

Dans "Le Monde" daté du 8 juin 2019, deux titres en effet inquiétants (p 4) :

  • "Hongkong se mobilise contre l'extradition vers la Chine" dont la dernière phrase de l'article, citation du patron de presse pro-démocratie Jimmy Lai, est : "c'est la dernière bataille de Hongkong".

  • " A Moscou, Vladimir Poutine et Xi Jinping célébrent l'amitié sino-russe" avec pour remarque que "Sur les grands dossiers du moment – Iran, Venezuela, Corée du Nord, Soudan, Syrie...- les deux pays sont sur la même ligne". Tout un programme !

Deux titres à mettre en parallèle avec avec cette remarque de l'écrivain Liao Yiwu, réfugié politique à Berlin, après avoir fui la Chine en 2011 : "Si j'étais en Chine aujourd'hui, je n'aurais pas pu m'en tirer à si bon compte. Il y a des caméras partout, une surveillance électronique de tous les instants, la technologie au service de la dictature. C'est vraiment 1984 [ d'Orwell, 1949] et Le Meilleur des Mondes [d'Huxley, 1931] combinés. Ces écrivains étaient vraiment visionnaires !" ("Le Monde des Livres", jeudi 30-vendredi 31 mai 2019, p 1).

Éric MEYER, dans sa préface du 13-11-18 à son indispensable livre "Pékin, Place Tian An Men" (Babel n° 1606 , mars 2019, 334 p.), ne dit pas autre chose : "L'État a occulté tout souvenir de la nuit fatale [du 3 au 4 juin 1989 : massacre de Tian An Men qui met fin au "printemps de Pékin"], devenu son secret – un secret de polichinelle, mais parfaitement respecté auprès des jeunes dont 95% n'ont aucune idée du massacre passé (...) L'école et les parents ont été complices (...) Individualiste, cette génération n'est pas sans altruisme mais craint de donner au risque de le faire en vain : les institutions de charité, chargées de collecter les fonds, sont gangrenées par la corruption. C'est donc une société bloquée. Mais c'est aussi une société fière de ses TGV, de ses autoroutes, de ses fusées, de ses réalisations depuis trente ans, de ses technologies nouvelles uniques au monde : l'État a réussi à remplacer, chez les jeunes, l'aspiration démocratique par le nationalisme." (p 11-13)

 

Mais il ajoute aussitôt : "Pour l'instant !" (ibid.). Car, lui qui est resté tout ce temps avec sa famille vivre dans le pays, se déclare "sous le charme de la huoli, énergie vitale, principal charme de la Chine. Cette huoli est le principe de résistance de chacun à une société encore plongée dans l'arbitraire." (p 14)

Quand on considère la résistance de la société civile de Hongkong à la mise au pas de la presqu'île par le gouvernement central, celle de la population de Taïwan aux prétentions annexionnistes de ce même gouvernement, la résistance des Tibétains et des Ouïgours à l'ethnocide, mais aussi la vitalité culturelle et le rayonnement de la diaspora démocrate chinoise, on se dit que le verrouillage mis en place par le gouvernement de Xi Jinping est voué à l'échec.

Un gouvernement qui se réclame de la "pensée de Mao" devrait pourtant le savoir : "Un se divise invariablement en Deux."

Comme le remarquait la journaliste de l'Obs Ursula Gauthier, lors de la mort en prison du prix Nobel de la Paix Liu Xiaobo en 2017 :

« Quand un intellectuel s'oppose à un Etat absolutiste, le premier pas vers la liberté est souvent un pas vers la prison. Je fais ce pas aujourd'hui, ce qui me rapproche d'autant de la liberté.» Tout Liu Xiaobo est contenu dans cette phrase extraite de sa plaidoirie: sa détermination, son courage et surtout son optimisme, là où ce sont plutôt les causes de désespérer qui semblent a priori l'emporter. "

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article