Pourquoi défendre l'État de Droit ?

Publié le par Henri LOURDOU

Pourquoi défendre l'État de Droit ?

 

Le RIC (Référendum d'initiative Citoyenne) est devenu un véritable mantra, psalmodié sur tous les ronds-points et réseaux sociaux de France, car il est le seul élément unificateur des "gilets jaunes". Mais est-il crédible ?

Il vaut la peine de s'y arrêter, tant le besoin de refonder la démocratie est aujourd'hui incontournable.

Nous y reviendrons donc.

 

Mais une question préalable se pose : "refonder" suppose-t-il de pratiquer la politique de la "table rase" et de légitimer le "dégagisme" à tout crin ?

 

Cela supposerait que tout l'acquis des luttes sociales et démocratiques depuis plus de deux siècles soit quantité négligeable. Que ce qu'on appelle "État de Droit", plus ancien encore, soit également susceptible de remise en cause.

Or, tant l'étude des révolutions du passé, que la pratique des situations concrètes du présent nous montrent le caractère précieux et irremplaçable des acquis sociaux et démocratiques et de l'État de Droit.

 

Qu'est-ce que l'État de Droit ?

 

Il s'agit d'un ensemble de règles, de principes et de pratiques qui permettent d'éviter la "lutte de tous contre tous", la violence perpétuelle et la dictature arbitraire de quelques uns ou d'un seul.

 

Première règle : la reconnaissance commune de la loi comme critère et horizon du vivre ensemble. Et donc le principe juridique d'organisation de la vie en société pour éviter le rapport de force permanent et le triomphe, également permanent, du plus fort. D'où l'adage bien connu : "Entre le faible et le fort, c'est la liberté qui opprime, et la loi qui affranchit".

 

Deuxième règle : la non remise en cause permanente de la loi. C'est-à-dire la construction d'un système juridique stable, qui permet la mise en place d'une doctrine basée sur des principes cohérents entre eux. Cela seul permet une évolution également cohérente des lois.

Cela n'exclut pas des ruptures : exemples du droit de vote des femmes, de l'abolition de la peine de mort, etc... mais uniquement quand elles vont dans le sens des principes.

Voire, ponctuellement, le refus d'obéir à une loi, mais uniquement lorsque celle-ci est contraire justment à la doctrine juridique et à ses principes.

 

C'est sur cet État de Droit, constitué dès la fin de l'Ancien Régime, que se sont construit s les acquis des luttes sociales et démocratiques. Suffrage universel, libertés individuelles, droits sociaux sont bâtis sur ce socle du respect de la loi et de la doctrine juridique constituée autour des trois principes républicains : liberté, égalité, fraternité.

 

Bien sûr, tout cela est imparfait, provisoire et perfectible. Mais également fragile, comme on peut le voir lors de toutes les périodes de crise.

 

Raison de plus pour préserver et défendre cet État de Droit pour qui veut éviter les pathologies habituelles de la démocratie que sont le despotisme d'un monarque élu ou les caprices d'une foule en proie aux passions attisées par les démagogues.

Les Athéniens du Ve siècle avant JC, auxquels on attribue généralement l'invention de la démocratie, les avaient bien expérimentées et nommées. Ce sont eux qui ont fait de l'aspiration à la monarchie un crime en instituant l'ostracisme (exil des suspects) et qui ont inventé le terme de "démagogue" pour dénoncer les orateurs flattant les plus viles passions du grand nombre (jalousie, ressentiment, haine).

 

Donc, il ne saurait être question de miser quoi que ce soit sur une insurrection bâtie sur de telles passions , et visiblement souhaitée aujourd'hui par certains politiciens battus aux élections, mais avides de pouvoir ou irresponsables.

Car nous sommes (encore) dans le cadre d'un État de Droit, et préserver ce cadre est vital pour une refondation réelle de la démocratie.

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