La démocratie et l'Etat de Droit sont menacés : défendons-les !

Publié le par Henri LOURDOU

La démocratie et l'Etat de Droit sont menacés : défendons-les !

La démocratie et l'État de Droit sont menacés :

défendons-les !

 

Une amie vient de me lire ce 1er janvier l'incroyable texte pondu par Jean-Luc Mélenchon. Je n'en croyais pas mes oreilles.

Après avoir fustigé le discours de voeux du président de la république, il se lance dans un hommage plus qu'appuyé aux leaders des "gilets jaunes". Et il file la comparaison historique entre l'un d'eux, Eric Drouet et son homonyme Jean-Baptiste Drouet, qui reconnut Louis XVI à Varennes lors de sa tentative de fuite à l'étranger en 1791, et fut à l'origine de son arrestation pour être reconduit à Paris.

Ce parallèle historique est plus que douteux. Il suggère en effet une assimilation de Macron, président élu, à Louis XVI, monarque héréditaire de droit divin. Et, si l'on poursuit la comparaison, il assimile la tentative de fuite de Louis XVI à l'étranger pour rejoindre une armée hostile à la France, au comportement actuel de Macron qui tenterait de livrer le pays à des forces étrangères hostiles (Bruxelles, la finance internationale, l'Otan, l'ONU ? Les quatre se mêlent dans le délire conspirationniste des néo-fascistes actuels).

On hésite entre rire et pleurer devant une telle outrance qui insulte à la fois le bon sens, la république et la démocratie.

Personnellement, je suis spontanément plutôt porté à voir l'infamie que le ridicule d'une telle déclaration. Car elle stérilise les forces de nombreuses personnes de bonne volonté qui avaient cru voir en Mélenchon et sa tentative politique une occasion de reconstruction de la Gauche en France.

Force est aujourd'hui de reconnaître qu'il n'aura contribué qu'à la détruire un peu plus.

Je voudrais me garder de manier moi aussi de façon outrancière le parallèle historique. Mais il me faut cependant conclure que, pour le moins, par cette déclaration, Mélenchon est passé sur l'autre versant de la démocratie : celui de ceux qui contribuent à la détruire.

 

L'Histoire ne se répète pas, mais elle est source d'enseignement. C'est ce qu'avaient voulu signifier Umberto ECO et quelques autres en 1997 en lançant un appel à la vigilance antifasciste que certains avaient alors jugé excessivement alarmiste.

Il avait publié dans la foulée un petit livre, judicieusement réédité en 2017 par Grasset sous le titre "Reconnaître le fascisme".

Il est devenu indispensable aujourd'hui de le lire ou de le relire.

Il y distingue ce qu'il appelle "l'Ur-fascisme, c'est-à-dire le fascisme primitif et éternel" (p 34); dont il précise que les caractéristiques sont impossibles à incorporer dans un système, mais dont "il suffit qu'une seule d'entre elles soit présente pour faire coaguler une nébuleuse fasciste".

C'est d'ailleurs cette plasticité qui empêche trop de gens de reconnaître aujourd'hui la coagulation en cours.

Mais comment ne pas voir, sauf à s'aveugler volontairement comme le font trop d'intellectuels "de gauche", dans le mouvement des "gilets jaunes" un nombre suffisant de ces caractéristiques ?

Un "appel aux classes moyennes frustrées, défavorisées par une crise économique ou une humiliation politique"(p 39-40), une "obsession du complot", une vision de la vie comme "une guerre permanente", une vision du peuple comme une "entité monolithique" induisant "un populisme qualitatif télé ou Internet, où la réponse émotive d'un groupe sélectionné de citoyens peut être présentée et acceptée comme la "voix du peuple"(comment ne pas reconnaître ici le "RIC-réponse à tout" et l'appel obsessionnel à la démission du président élu ?). Et ECO de conclure, et nous avec lui : "Chaque fois qu'un politicien émet des doutes quant à la légitimité du parlement parce qu'il ne représente pas la "voix du peuple", on flaire l'odeur de l'Ur-fascisme" (p 47).

Il faut ici faire appel à l'Histoire de notre pays. Et rappeler la fragilité de notre démocratie et de notre État de Droit.

Malgré le quasi-consensus un peu honteux autour des "institutions de la 5e république", il faut rappeler que notre démocratie et notre État de Droit ne se sont jamais complètement remis du coup de force du 13 mai 1958 qui a donné naissance à la 5e république.

Raison de plus pour les défendre avec intransigeance.

 

En allant manifester pacifiquement ce 5 janvier avec mes amis du Réseau Éducation Sans Frontières devant la préfecture des Hautes-Pyrénées pour défendre les droits d'une jeune demandeuse d'asile albanaise et de sa fille de trois ans, nous avons examiné à quelques uns l'état des grilles de la préfecture ébranlées il y a quelques semaines par des "gilets jaunes".

Comment pourrions-nous revendiquer le respect de ces droits dans une situation insurrectionnelle où l'État de Droit est suspendu ?

 

La démocratie et l'État de Droit sont aujourd'hui menacés : défendons-les !

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