Vers un ordre juridique planétaire

Vers un ordre juridique planétaire

Mireille DELMAS-MARTY "De la grande accélération à la grande métamorphose", Le Bord de l'Eau, mai 2017, 52 p.

Carla DEL PONTE "J'espère qu'un jour on pourra tenir le procès de Bachar", entrevue au magazine "Society"n°70 du 23 novembre 2017, p 67-68.

Dans un ouvrage d'intervention, la grande juriste Mireille DELMAS-MARTY, professeur émérite au Collège de France, plaide en faveur de l'idée qu'un ordre juridique à vocation planétaire, de plus en plus nécessaire et attendu, est en gestation.

Le désordre planétaire apparent et l'impuissance ressentie ne seraient que la première phase d'une métamorphose en cours.

Parallèlement, la praticienne du Droit qu'est la procureuse Carla DEL PONTE, fait état de sa déception face à l'impuissance de la société internationale à rendre justice aux victimes de la guerre en Syrie.

La mise en rapport de ces deux contributions pourrait amener à remettre en cause l'optimisme mesuré dont fait preuve M.DELMAS-MARTY. En effet, elle soutient que la crise climatique est un formidable accélérateur de la mise en place d'un ordre juridique planétaire.

Or, C. DEL PONTE n'a-t-elle pas démissionné avec fracas en septembre 2017 de la Commission d'enquête de l'Onu sur la Syrie, face à la totale absence de prise en compte de crimes documentés par cette Commission ?

Néanmoins, je maintiens ce que j'écrivais précédemment sur la Syrie, suite à un article de juin 2017 de la revue "Esprit" : malgré l'impunité présente, encore renforcée par la haute main de la Russie sur la sortie du conflit armé en Syrie, les bourreaux finiront par rendre des comptes.

En effet, les tendances décrites et analysées par M.DELMAS-MARTY sont des tendances "lourdes" qui affectent l'ensemble de la société mondiale.

Ces tendances sont celles d'une évolution du Droit selon trois modalités : "de la fragmentation à l'harmonisation", "de la dilution au partage des responsabilités" et "de l'instabilité à l'anticipation".

Ces trois types d'évolution des pratiques et de la doctrine juridiques sont rendus nécessaires par les enjeux nouveaux et les aspirations nouvelles.

Ces évolutions ne se feront certes pas sans conflits ni ruptures. Et l'une de ces ruptures portera sans doute sur l'abolition du droit de veto des 5 membres permanents du Conseil de Sécurité de l'Onu. Ce droit qui a retardé si fâcheusement, comme le rappelle C.DEL PONTE, l'avancée de la justice en Syrie, à travers les vetos successifs de la Russie à différentes résolutions.

Mais, n'en doutons pas, "on tiendra un jour le procès de Bachar", contrairement à ce qui s'est passé pour Franco, comme on vient de tenir, 22 ans après les faits, le procès de Ratko MLADIĆ, le bourreau de Srebrenica, enfin condamné le 22 novembre 2017 à la prison à perpétuité par le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie (TPIY).

https://www.letemps.ch/monde/2017/11/22/ratko-mladic-condamne-genocide