Europe : quelle refondation ?

Publié le par Henri LOURDOU

Europe : quelle refondation ?

 

Le projet porté par Emmanuel Macron a les apparences du réalisme. Il est pourtant gros de dangers peut-être supérieurs à ceux du statu quo. Or, celui-ci est de plus en plus intenable.

 

Dans la nécessité qui s'impose à nous de refonder l'UE, il est impératif de ne pas lâcher la proie pour l'ombre.

Pour cela il est besoin d'une grande lucidité.

 

Les dangers qui menacent l'Europe

 

Ils ne se limitent pas, comme feint de le croire le président français, à une simple insuffisance de "coordination économique" au sein de la zone euro qu'il faudrait renforcer par un mécanisme institutionnel.

Ce qui est en jeu est bien plus que cela.

Il s'agit bien de la difficulté à prendre collectivement conscience d'une communauté de destin. Et cela pose la question économique au second plan, derrière la question politique des objectifs de l'Union et de ses valeurs.

Objectifs : s'agit-il de faire face aux grands défis de ce temps : épuisement du modèle productiviste face à l'enjeu écologique, prise en compte de la vague migratoire venue de l'autre côté de la Méditerranée, règlement des conflits à nos portes ?

Valeurs : voulons-nous continuer à porter l'étendard des droits humains et de la solidarité ?

 

Face à ce défi, l'UE hésite entre la paralysie et l'abandon aux réflexes de repli identitaire et autoritaire des nationalismes les plus régressifs. Et l'une des modalités de cet abandon serait l'Europe à deux vitesses que prône Macron. Car elle renforcerait ce repli chez les peuples de la "zone 2" en développant le ressentiment contre "l'Europe des riches".

 

Une refondation radicale

 

La refondation dont nous avons besoin ne peut être que radicale.

Et pour cela, elle doit s'exercer à plusieurs niveaux. Comme le dit Etienne Balibar, dans son discours de réception du prix Hanna Arendt pour la pensée politique, prononcé à Brême le 1er décembre 2017, nous devons avoir en tête au moins cinq conditions du changement.

La première est celle d'un engagement européen sur les grands enjeux mondiaux : régulation financière et environnementale, règlement des conflits par une avancée vers un ordre juridique mondial fondé sur les droits humains.

La seconde est un progrès visible dans la constitution d'une démocratie européenne réelle dépassant le monopole des gouvernements nationaux dans la définition de l'intérêt général européen; et pour cela, une troisième condition est nécessaire : l'invention de formes de participation citoyenne impliquant le plus grand nombre sur l es enjeux européens.

Ce qui suppose à son tour une quatrième condition : la création de mouvements collectifs à l'échelle européenne. Mais celle-ci ne pourra se faire que si émerge un agenda entraînant l'adhésion collective, autrement dit des thèmes de campagne faisant converger les attentes d'un nombre significatif de citoyen.ne.s européen.ne.s.

 

Ce sont ces thèmes de campagne qui semblent difficiles à faire émerger dans la situation actuelle de décomposition de la représentation politique. E Balibar suggère ceux des inégalités, de la "nouvelle question nationale" et du défi de l'hospitalité.

Mais qui et comment va les placer au premier plan de l'action politique ? C'est le défi qui nous est lancé.

http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2017/12/16/etienne-balibar-refonder-radicalement-l-europe_5230661_3232.html?xtmc=etienne_balibar_refonder_radicalement_l_europe&xtcr=1

 

 

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