Gérard NOIRIEL pour en finir avec les mythes du communautarisme et de l'intégration

Publié le par Henri LOURDOU

Gérard NOIRIEL pour en finir avec les mythes du communautarisme et de l'intégration

Pour en finir avec les mythes du communautarisme

et de l'intégration,

et combattre enfin les stigmatisations :

 

Gérard NOIRIEL

Immigration,

antisémitisme et racisme

en France

(XIXe – XXe siècle)

Discours publics, humilations privées

(Fayard, juin 2007, 718 p.)

 

Gérard NOIRIEL s'est fait connaître surtout en 1988 dans le petit monde de l'Histoire universitaire par son livre "Le creuset français -Histoire de l'immigration, XIXe – XXe siècle" (Points-Histoire n°161, 1992, 442 p ), qui en a fait un spécialiste reconnu de la question.

Près de 20 ans après, il revient sur le sujet en insistant sur le fait qu'il n'avait pas alors écrit dans le but de faire une apologie du "modèle français d'intégration", mais juste de "décrire et d'expliquer le phénomène" de l'immigration. Avec le recul, il s'aperçoit même que son objectif réel était de "démontrer que la polémique sur "l'intégration des immigrés" était un "faux problème"." Et il ajoute : "Je n'avais pas tort sur ce point, le présent livre le confirmera amplement." (p 12)

On y reviendra.

Par contre, l'approche du présent livre prend pour fil conducteur l'antisémitisme et le racisme car il entend approfondir son sujet en se plaçant du côté de l'expérience vécue, celle des "humiliations privées" subies par les personnes stigmatisées, et du côté de la fabrication sociale des conditions qui permettent la généralisation à certains moments de ces stigmatisations, et qui relèvent de la "parole publique". Pour cela, il s'appuie sur les nombreux travaux de recherche universitaire menés depuis vingt ans.

Et c'est l'objet d'une première remarque importante.

S'appuyant sur les travaux de Pierre Bourdieu, il précise, à propos des "propos ou des attitudes qui dévalorisent les autres" : "Le plus souvent, ce type de réactions (il vient de donner l'exemple, auto-analysé, de Proust avec sa gouvernante, qui montre l'universalité du réflexe) ne dépasse pas la sphère privée et se présente sous la forme de simples réflexes ou de "mauvaises pensées" qui traversent fugitivement notre esprit, mais que nous refusons énergiquement d'afficher publiquement car nous savons qu'ils font partie des instincts que nous devons réprimer, si nous voulons rester des personnes civilisées."(p9)

Par contre, "le simple fait de transformer des intentions, des réflexes, des pulsions de haine ou de dégoût en discours écrit modifie leur sens et leurs effets. Même s'ils refusent le plus souvent d'admettre cette vérité, les professionnels de la parole publique ne se contentent jamais de "dire tout haut ce que les gens pensent tout bas." Par leurs propos, par les mots qu'ils utilisent ou les représentations qu'ils diffusent, ils contribuent à modeler l'identité des personnes et des groupes sociaux." (ibidem)

Et cela même, et peut-être surtout, quand les discours qu'ils tiennent ne sont pas "politiques". Ainsi, "nous verrons qu'une multitude d'écrits péjoratifs sur les immigrés et sur les colonisés ont été élaborés par des écrivains, des journalistes ou des experts qui combattaient par ailleurs le nationalisme et le racisme. Ces idéologies illustrent le degré ultime de la stigmatisation. Elles n'apparaissent que lorsque les préjugés diffusés dans l'espace public sont entrés dans le "sens commun" et sont considérés comme des évidences par l'opinion. A ce moment-là seulement, ces représentations négatives peuvent être politisées, c'est-à-dire inscrite dans un récit qui présente les Français comme les victimes du groupe social stigmatisé, et qui propose un programme permettant d'éliminer les agresseurs, d'une manière ou d'une autre." (p 10)

 

 

L'intérêt d'un retour historique sur les différents épisodes de stigmatisation de minorités immigrées est de montrer tout d'abord que les minorités visées ont été très diverses, et les arguments menant à leur stigmatisation également.

Ainsi les premiers "immigrés" (le mot n'existe pas encore et l'on verra sa genèse) sont les paysans provinciaux arrivés en masse à Paris pour devenir des prolétaires, sous la monarchie de Juillet, dans les années 1840. Ce sont les classes dominantes parisiennes qui désignent ces nouveaux venus comme "classes dangereuses" sous le triple aspect sanitaire (leurs conditions de vie lamentables favorisent les épidémies) , sécuritaire (ils sont souvent jeunes, célibataires et portés à la violence) et politique (le souvenir de 1792-93 hante les mémoires) (p 55). Dans l'élaboration du "discours écrit" qui entérine cette représentation, les romanciers jouent un rôle conjoint et convergent avec les journalistes et les experts, avec le relais nouveau de la presse, et la reprise in fine par les fonctionnaires chargés de la sécurité. (p 56-58)

Et là déjà, on peut constater la reprise du stéréotype de l'ouvrier comme "barbare" par des intellectuels bourgeois prenant soi-disant sa défense...

Il faut se tourner vers les premiers écrivains prolétariens, comme Martin Nadaud, "maçon de la Creuse", pour comprendre comment ce stéréotype a été élaboré. C'est le mépris et les humiliations subies qui expliquent l'émergence de comportements violents, et non l'inverse (p 60-61). Quant au risque sanitaire, tout le monde aura compris qu'il résulte de l'exploitation subie et non d'une supposée indifférence à l'hygiène...

Ce premier épisode de stigmatisation collective est intéressant, car il montre bien que l'aspect "national" n'est pas premier : c'est bien l'aspect "social" qui l'emporte.

 

Toute l'histoire des immigrations depuis lors va aller dans le sens de l'ethnicisation et de la "faitdiversisation" du social, à travers l'émergence d'un discours national-sécuritaire qui structure l'imaginaire de Droite, opposé à un discours social-humanitaire qui structure, mais de façon moins solide, comme on le verra, celui de Gauche.

Cependant, il n'est pas indifférent de constater, pour comprendre notamment le caractère globalement dominant de l'imaginaire "national-sécuritaire", que celui-ci s'est constitué en 1793-94 par un retournement complet du "credo humaniste et universaliste" de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : "Albert Mathiez (grand historien de la Révolution du début du XXe) a montré que les grandes lignes du discours nationaliste sur l' "ennemi de l'intérieur", qui sera sans cesse réactivé aux XIXe et XXe siècles par les partis de droite et d'extrême-droite, ont été inventés au cours de ces quelques mois".(p 33)

Soulignons juste que ce retournement s'opère à la faveur d'un contexte de guerre et de menace d'invasion : et de fait, c'est le climat ou le contexte de guerre qui, à chaque occasion, favorise son succès. La création délibérée d'un tel climat anxiogène est donc un instrument politique favori de ces courants politiques, et cela doit éveiller notre vigilance constante : on y reviendra.

Par ailleurs, la domination de l'un ou l'autre discours dans l'espace public selon les époques, produit des effets d'amnésie récurrente de "professionnels de la parole publiques" aptes à passer d'un discours à l'autre au gré de leurs intérêts.

Ainsi le grand renversement (très progressif) du rapport de force entre 1945 et 1981 amène certains à carrément réécrire l'Histoire des années 1930. Car le paradigme biologique du racisme étant complètement discrédité, il faut faire absolument oublier certains discours passés qui ne passent plus.... quitte à qualifier les années 30 d'âge d'or de l'accueil et de l'intégration (Exemple de l'historien Louis Chevalier, ancien théoricien vichyste du racisme biologique, p 535-536 : "Nous avons ici un exemple, véritablement stupéfiant, du pouvoir que détiennent les intellectuels de réécrire l'histoire dans le sens qui les arrange.(...) Le fait qu'aucun membre de la corporation historienne (à ma connaissance) n'ait publiquement protesté en dit long sur l'esprit critique de ce milieu."

Il n'en reste pas moins, comme le montre la photo de couverture du livre ("Manifestation d'étudiants à Paris vers 1935", représentant un groupe d'étudiants en médecine), que le discours sur les "races antagonistes" ou les "races inférieures" a été dominant de 1880 à 1950 dans toutes les publications "scientifiques" traitant des migrations.

Alors que durant cette période qui va de 1968 à 1981, le problème de "l'intégration" de minorités supposées inassimilables n'est plus posé.

Par contre, la problématique de l'égalité des droits, et notamment des inégalités sociales, domine la scène publique.

Comment le rapport de force s'est-il renversé depuis lors ? C'est là sans doute la partie la plus intéressante à mes yeux.

 

Car la Gauche a elle-même orchestré sa défaite idéologique en investissant de fausses représentations du réel qui ont alimenté et alimentent les stigmatisations qu'elle prétend combattre, et renforcent les divisions de ceux qui devraient s'unir autour d'elle.

 

Après 1981 : l'offensive de la Droite

 

Le point de départ réside bien sûr dans l'arrivée de la Gauche au pouvoir en 1981, et dans les mesures, conformes à son programme, qu'elle prend aussitôt.

C'est le cas notamment de la régularisation des "sans papiers", victimes de la politique antérieure de soi-disant fermeture des frontières : 110 000 régularisés, mais déjà de façon restrictive car on estime leur nombre à 300 000 (p 607). Mesure qui cependant provoque ce que tous les élus de Gauche vont intérioriser comme la chose à éviter absolument : le fameux "appel d'air". Il faut cependant en bien mesurer l'ampleur : quelques dizaines de milliers de personnes tout au plus, loin de l"l'invasion" évoquée à nouveau de façon récurrente par la presse de Droite et d'Extrême-Droite. Notamment des Turcs venus de l'Allemagne voisine. En témoigne le chiffre des étrangers résidant en France du Recensement de 1982 : 3 714 000 contre 3 440 000 au précédent Recensement de 1975. Entre ces deux dates, la population totale est passé de 52 600 000 à 54 335 000...

Mais le caractère "problématique" de cette présence étrangère est mis en avant à travers la "faitdiversisation" télévisée, amplifiée par les commentaires de la presse écrite de Droite. C'est à travers ce qu'on a baptisé le "rodéo des Minguettes", cette cité de la banlieue lyonnaise où les incidents avec la police, récurrents, mais non "médiatisés" jusque-là sont mis en avant à partir de l'été 1981.

Comme le remarque l'auteur, à propos du quotidien de de droite de référence, Le Figaro : "Alors que jusqu'en 1980 les reportages sur l'immigration étaient rares dans ce quotidien, un changement radical se produit à partir de 1981. En 1983, par exemple, Le Figaro publie 22 reportages sur ce thème ! En juillet 1981, c'est le premier journal qui fait explicitement le lien entre le "rodéo des Minguettes" et le "laxisme" de la gauche face aux "clandestins".(...) Dès ce moment, on voit s'établir une équivalence entre "Maghrébins", "individus douteux" et "dévoyés", alors que cette rhétorique était jusque-là réservée aux journaux d'extrême-droite.

Le 22 septembre 1981, Le Figaro revient à la charge avec un article intitulé : "Les Maghrébins et les autres". Le journaliste affirme qu'en régularisant les "clandestins", le gouvernement "a ouvert en grand la porte de notre pays à l'invasion et à l'aventure."" (p 608)

Le thème est ré-exploité dans une nouvelle série d'articles en juillet 1982 en ciblant toujours "les Maghrébins".

Il devient le thème central de la campagne de la droite aux municipales du printemps 1983, avec le soutien sans faille du Figaro.

Mais cela n'aurait pas suffi sans la vitrine offerte par la télévision, qui fait du "rodéo des Minguettes" un produit d'appel de l'info-spectacle qui prend alors son plein essor : "Des jeunes gens masqués qui attaquent des policiers, c'était l'idéal pour faire monter l'audimat et donc pour attirer des annonceurs." (p 610)

Cette prise de pouvoir de la télévision sur "l'établissement des faits", condamne la presse écrite au commentaire sans possibilité de les remettre en cause ou de les hiérarchiser autrement que par leur caractère spectaculaire.

C'est ainsi qu'un second type d'événement va imposer une grille de lecture unique et stigmatisante, dont bien entendu la droite et l'extrême-droite vont s'emparer avec délectation, mais que la gauche, signant ainsi sa défaite idéologique, va accepter sans discuter.

Il s'agit des grèves des OS immigrés de l'automobile entre 1981 et 1984, qui vont voir émerger le spectre de l'islamisme. Cette mise en forme des faits va s'appuyer sur le réflexe "d'inégalité retournée" (un concept fondamental pour comprendre les processus de division du salariat et des classes populaires qui se mettent alors en place) de la part des OP français : "Que des individus considérés comme inférieurs puissent revendiquer l'égalité leur apparaissait comme une dévalorisation de leur propre statut."(p 612)

Ce concept "d'inégalité retournée" est présenté p 435 : tiré du livre de Marc Bloch "L'étrange défaite", à propos de la radicalisation xénophobe et antisémite de la petite bourgeoisie face au Front populaire,  il exprime le sentiment de déclassement  ressenti par certaines catégories de par la promotion de catégories jugées jusque-là inférieures. Dès lors un travail de "réparation symbolique" consiste à charger ces catégories de griefs imaginaires pour sauvegarder le sentiment de sa propre dignité en revalorisant son statut par l'agression contre ces inférieurs devenus "supérieurs".

Or, "Comme en 1936, la droite va tenter de discréditer ces grèves en les présentant comme une entreprise fomentée par des agents de l'extérieur. Nous sommes ici au moment où "le bolchevik aux ordres de Moscou" cède la place à "l'intégriste aux ordres des ayatollah". Les commentaires du Monde dénonçant l'"islam rouge" illustrent bien cette mise en équivalence, d e même que la photo de Paris-Match montrant un travailleur musulman arborant le drapeau de la CGT, avec un commentaire sur la "grève sainte" (20 janvier 1984)." (ibidem)

Ces commentaires s'appuient sur les images télévisées montrant des délégués munis de porte-voix pour haranguer les grévistes en langue arabe, ou d'ouvriers musulmans en train de prier dans les ateliers. "A partir de ce moment, la messe est dite. Le caractère religieux de ces grèves est devenu un fait objectif." (p 613) La juxtaposition de ces images avec celles des terroristes islamistes de Téhéran suffit à donner aux commentateurs de la presse écrite l'élément d'explication permettant de nourrir leurs analyses...

 

La double capitulation de la Gauche

 

G.Noiriel insiste beaucoup sur ce dernier épisode : "car c'est la première fois que les dirigeants de la gauche vont capituler devant l'adversaire." (p 613)

C'est ainsi que le Premier ministre Pierre Mauroy déclare que les ouvriers grévistes (qui réclament rappelons-le une revalorisation leur permettant de passer d'OS à OP) sont "agités par des groupes religieux et politiques dont les mobiles ont peu à voir avec les réalités sociales françaises". Cette interprétation est publiquement applaudie par Minute et par Le Figaro Magazine qui soulignent le "courage politique de Mauroy"." (ibidem)

L'échec consécutif de ces grèves, avec les plans de réduction massive des effectifs et l'automatisation des process de production, aboutit à la disparition de la figure publique du "travailleur immigré" qui avait émergé dans les années 68.

Mais la défaite idéologique de la Gauche ne va pas s'arrêter-là. La "première génération" ayant été mise hors-jeu par l'échec des grèves de 1981-84, l'attention publique va se focaliser sur la "deuxième génération" avec la réémergence d'une thématique oubliée : celle de "l'intégration".

Et ici hélas aussi, la Gauche va louper le coche en acceptant de jouer sur le terrain dessiné par l'adversaire.

 

En abandonnant le terrain social pour le terrain culturel, en acceptant l'idée, venue des années 30 (Noiriel remarque : "On retrouve exactement le même type d'arguments", p 614), qu'il y aurait un "problème d'intégration des immigrés", la Gauche crée elle-même les conditions de sa défaite, voire de son explosion à moyen terme. Et nous en sommes déjà là, en effet, 35 ans plus tard. D'où l'importance cruciale de mesurer les causes de cette déroute, pour inverser le cours des choses.

C'est ainsi que ce qui avait pu apparaître comme des victoires tactiques (La marche pour l'égalité et contre le racisme de 1983, le mouvement SOS racisme en 1986), s'avère en fait lourd de défaites et de divisions qui se creusent à Gauche autour de faux débats, dont le plus emblématique fut celui sur le port du voile. Et in fine un basculement à droite d'une bonne partie de l'électorat d'origine juive, dans l'abstention de bon nombre d'électeurs d'origine musulmane, et dans le vote d'extrême-droite d'une partie significative de la classe ouvrière "blanche".

 

Comment en est-on arrivé-là ?

Le glissement culturel célébrant la "culture beur" (mot popularisé par le journal "Libération") pour célébrer le métissage culturel en oubliant au passage les questions sociales d'égalité des droits, a maintenu intacte la problématique d'"intégration" imposée par l'extrême-droite.

En se focalisant sur la dénonciation morale des discriminations au lieu de s'attaquer à leurs causes (la mise en place des stéréotypes stigmatisants et les politiques sociales inégalitaires), la gauche de gouvernement a accentué les divisions au sein du peuple au lieu de les réduire.

Ainsi s'est renforcé au cours du temps, et chaque fois avec la bénédiction des dirigeants de gauche, le stéréotype du "musulman inassimilable et sympathisant du terrorisme", lui-même assimilé au "migrant", forcément "clandestin".

Ce stéréotype s'est appliqué aux femmes "manipulées" dans la longue affaire du "foulard". Et comme lors de tous les épisodes précédents, ainsi que le rappelle G.Noiriel, les événements extérieurs viennent nourrir le discours intérieur : ainsi l'émergence de l'Etat islamique en Syrie a nourri la psychose du terrorisme associé aux migrants. Le conflit israélo-palestinien alimentant une opposition factice entre antisémitisme et islamophobie : la lutte contre l'un exclurait la lutte contre l'autre...au rebours de toute la meilleure tradition de Gauche.

 

Inverser le cours des choses

 

Telle est bien notre tâche de l'heure. Pour cela, appuyons-nous sur les préconisations de G.Noiriel dans sa conclusion.

La priorité est bien dans le travail sur la langue, en déconstruisant les stéréotypes véhiculés par les média, mais repris et utilisés par les responsables politiques et administratifs.

Ainsi le retournement par les néo-nazis masqués d'Internet, que je viens juste d'analyser brièvement, de vidéos gouvernementales sur l'intégration des réfugiés, n'est rendu aussi facile que par la fausseté fondamentale de la problématique d'intégration. Si le gouvernement, et ses organes, communiquaient en terme d'égalité des droits, la question se poserait tout autrement.

Cependant, cela n'est bien entendu pas suffisant. Car la racine du problème est bien, comme le dit Noiriel , dans la fabrication des stéréotypes qui permettent la stigmatisation de certains groupes. Or cette fabrication se situe "en amont du politique"(p 689).

Et c'est là prioritairement qu'il faut agir.

D'abord par une réflexion collective de tous ceux qui fabriquent les discours publics à tous les niveaux sur ces stéréotypes le plus souvent inconscients.

Ensuite par un accès à la parole publique des personnes stigmatisées. Il est important, il est même vital qu'elles puissent dénoncer elles-mêmes les humiliations privées dont elles sont victimes pour les transformer en objets de combats collectifs.

Par un refus des "assignations identitaires" obligeant les personnes à ne s'identifier qu'à une seule dimension de leur identité. Pour cela éviter l'enfermement dans les discours mémoriels victimaires, et, en tant qu'historiens, valoriser les différents éléments qui ont joué un rôle dans la construction des identités collectives et leur variété.

 

Ce triple projet est présent dans l'investissement de G . Noiriel dans la Cité Nationale d'Histoire de l'Immigration, dont la mise en place débutait au moment de la rédaction de ce livre.

Pour avoir visité depuis cet ex-musée des colonies de la Porte Dorée à Paris, il me semble que le pari a été tenu. Mais c'est à chacun de nous, là où il est, de le porter.

Publié dans Immigration, Histoire

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